Cette concision du texte est toute harmonie au service du pont tiré par l'œuvre entre minimalisme et mesquinerie ; un texticule pour soixante-douze édicules, touché par une aptitude au creux à vous filer le vertige. Ce texte fait l'aveu, s'il en fallait un, de la nullité complète de l'œuvre qu'il évoque et de l'impossibilité qu'il y aurait à en dire quoi que ce soit. « Aurélie Nemours a imaginé une sculpture entre ciel et terre pour Rennes». Un sculpteur imaginant une sculpture entre ciel et terre, voilà qui épate notre petit plumitif qu'aucune redondance n'effraie ; une sculpture entre ciel et terre ? Mais comment pourrait-il en être autrement, Machin? Hé, entre quoi tu voudrais qu'ils soient plantés tes surimis à la con?
Je serais assez curieux de savoir ce qui n'est pas à proprement parler entre ciel et terre, tu sais, anonyme rédacteur de mon cœur... Nous sommes tous là, entre ciel et terre, tenant entre le ciel et la terre cette plaquette de merde, moi entre ciel et terre et mes couilles entre ciel et terre, tous plantés pour l'inauguration entre ciel et terre de soixante-douze sinistres répliques des immeubles minables parmi lesquels on a eu l'audace de planter ces parodies, histoire de bien ramener les urbains à l'urbanisme, de bien les y enliser, les persuader qu'il n'y a pas de porte de sortie et surtout pas l'art, serrés tenus plombés entre ciel et terre à nous demander s'il existerait pas par hasard des sculptures entre terre et terre, entre ciel et ciel, entre galactica et darth vador, n'importe quoi qui nous épargne la réinvention consternante de la colonnade en plein XXIe siècle ?
Mais c'est que ça leur plaît foutrement aux notables qui vont nous faire l'homélie justificative de ce caprice budgétaire, ça leur plait ce « entre ciel et terre », ils vont nous la faire rouler dans la bouche avec gourmandise cette tirade à deux sous, jonglant comme des ours à culs lourds avec « entre terre et ciel » pour changer un petit peu ; voilà qui est bien se payer de formules usées par de la poésie de calendrier.