S. Lumineau:
Je ne pense pas que ce soit de leur propre chef.
L.L. de Mars:
Ça veut dire que
S. Lumineau:
Non, mais (rires). Ça mérite d’être développé
(rires). C’est à dire que à un moment donné,
euh, voilà, déjà le fait de me dire, « je veux
être dessinateur de bandes dessinées », c’est
déjà restrictif... Puisque déjà, enfin...
On peut dire, ha bin voilà, on sait, on sait ce qu’est la
bande dessinée, finalement, enfin...
L.L. de Mars:
Bah oui, euh, dans quelle mesure tu peux me dire ça ? Tu es le
premier à me dire : soit, je découvre la bande dessinée
dans des conditions enfantines, mais la révélation pour
moi c’est Crumb. Alors ? Je t’y renvoie! Tu me dis : «
qui a accès à Crumb ? » Pas d’accord ! Qui avait
accès à Rothko dans les années 60 ? C’est pas
un problème, plus que ça, qui a accès au «Livre»
de Guyotat dans les années 80 ?... Je... Je... Je pense pas que
le problème vienne de là, je pense qu’il vient réellement
de la façon dont les dessinateurs eux-mêmes semblent se maintenir
sur une ligne complètement paradoxale, c’est-à-dire,
aspirer d’une part à la reconnaissance d’une légitimité,
un art adulte avec des problématiques adultes, de nouvelles typologies,
et présentant pourtant, têtus comme des mules, un héritage
de tous les caractères enfantins, tous les signes visibles de quelque
chose qui... De façon têtue, permanente, maintienne en vie,
Dieu sait pourquoi, le bonheur nostalgique qu’ils ont eu en découvrant
la bande dessinée. C’est quand même... Assez contradictoire
: c’est-à-dire accepter d’une part... Toi-même,
tu arrêtes pas de parler de commerce, ce qui te ressemble aussi
peu, c’est drôle de t’entendre toi, dire ça,
ça n’a pas de sens...
S. Lumineau:
Oui mais, c’est une réalité. Moi, enfin, euh... La
bande dessinée fonctionne très bien... D’un point
de vue commercial. Donc, enfin, honnêtement, moi je... Je, je le
dis assez souvent, pour moi la bande dessinée c’est avant
tout, non pas un art, mais un commerce. Enfin, majoritairement, c’est
un commerce. C’est pour ça que ça pose problème...
Quand j’essaie de séparer les deux choses, enfin, qu’est-ce
qui est produit d’un point de vue artistique et d’un point
de vue commercial?, on voit bien que l’équilibre se fait
absolument pas. Et... Et les éditeurs et... Les auteurs, c’est
con à dire, vont maintenir ça, quoi parce que c’est
aussi l’idée, parce que c’est aussi un gagne-pain,
quoi.
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