Ces infographies sont à mon sens une pratique de la rencontre -des syntagmes graphiques ; elles brassent dans cette cohérence là -la seule qui vaille- un disparate de matériaux qui s'agencent par le calque et tentent de se soustraire au régime toujours récognitif de la représentation. Qu'elle tourne à l'identification, au décalque, à l'analogie, à la répétition du même, je crois que la représentation comme milieu des images les reconduit au religieux, ou à l'histoire. Ces planches sont alors une tentative de plus de creuser l'écart entre la valeur d'usage (ce qui en elles fait devenir) et la valeur d'exposition (ce qu'il y a en elles d'assignateur et d'assigné) des images qui s'y débattent et y partouzent allègrement -photographies, archives, dessins, gravures, interventions à la palette graphique, tout ça ludionne dans une image-rencontre qui ne veut rien clore, et n'a pour tout foyer qu'une fragile fomentation d'inconnu.
Ces planches sont une manière, en quelque sorte, d'invaginer les cadres de visibilité dans le repli d'histoire et de regard qui les rend possible, de rendre tangible une expérience aussi pénible qu'inévitable: le parasitage de l'historicité par l'historicisme, de la durée par son fossile, de l'association libre par l'archive, du devenir par l'histoire, de l'horizon par le paysage. Elles sont ce parasitage, et sa possible dissolution. Les diverses séries ou affinités embryonnaires qu'elles entretiennent plus ou moins lâchement coulissent sur plusieurs axes : la cartographie dans ce qu'elle a de fossile, l'ennoiement de la balade par l'histoire, le jardin des motifs comme lieu du politique, mais leur enjeu, disons processuel, est de jouer le syntagme et ses rencontres contre le paradigme et ses assignations. Elles sont nées d'un montage immanent, d'une matériologie active. C'est une greffologie par le milieu.
Qu'elles travaillent dans cette épaisseur limite qu'est toute cartographie, qu'elles soient biopsies d'un flou, flottement de l'histoire dans la dérive ou qu'elles s'essaient à mettre la confusion debout, leur horizon limite est le délabrement du connu, dans le constructivisme anarchique d'un monde à la balade.
Aurélien Leif - automne 2013
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