MARC POISSENOT

Marc Pöissenot, Paris, 1999Né à Dinan, en 1964. Conservatoire de Rennes (clarinette, solfège, écriture, musique de chambre, composition), Conservatoire national supérieur de musique de Paris (analyse, composition, électroacoustique, orchestration). Facultés de Rennes, puis de Paris IV (actuellement en doctorat de musicologie). Agrégé de musicologie. Vit et travaille à Paris.
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ÉTUDES DES PARTITIONS
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  " Attiré par d'autres domaines que la musique (les arts, la littérature),
je conçois souvent mes pièces dans un rapport à ces autres formes d'expression, même si je ne crois pas à l'idéal fusionnel du Gesamtkunstwerk. La fréquentation de la littérature, de la poésie, de la peinture ou encore de l'architecture sont pour moi autant de déclencheurs potentiels pour la composition. Dans ce cas, je travaille plus ou moins directement d'après une émotion, une sensation extérieure à la musique.
Il arrive également que la référence à une idée extra-musicale ne s'impose qu'au cours du travail de composition, venant donner ainsi une formulation plus claire aux problèmes compositionnels que je me suis posés. "

  " La nature, liée à la science, est également une source d'inspiration pour moi. Les phénomènes météorologiques ou les procédés de développement du vivant, par essence liés au temps, constituant d'une certaine manière des métaphores du musical. Au niveau rythmique notamment, on trouvera dans mon écriture des procédés de développement qui peuvent être interprétés par référence au monde continu de la nature. Dans cette pensée par processus, il m'intéresse particulièrement de constater qu'un objet de départ, traité par évolution continue des paramètres, peut engendrer un objet d'arrivée radicalement différent. (Ainsi par exemple du processus d'éclosion d'une fleur, processus continu au niveau biologique de la cellule, dont aux deux extrêmes le bourgeon et la fleur constituent des états d'apparence pourtant très dissemblables).
Par une gestion temporelle particulière des processus compositionnels (trous de temps, compression-dilatation des durées, simultanéité de processus) s'instaure une dialectique continue/discontinue, laquelle constitue selon moi un enjeu essentiel de la composition.
D'abord marqué par les problématiques post-sérielles, je me suis peu à peu dégagé de celles-ci, en allant vers une généralisation de la pensée par processus s'étendant à toutes les catégories de l'écriture (hauteurs, durées, timbres, dynamique) et à la conception de la forme. "

Pièces disponibles
sur le site
(présentations et échantillons)

 

* Sextuor (1989)

* Passion Flower (1990)

* Aerea (1991)

* Septuor (1991)

* Le ciel noyé (1992)

* Doubles (1993)

* Sur le sable (1995)

* Terre tendre et austère (1996)

* Hunt (1998-2002)
festival Art-Bag 2002


CATALOGUE DES OEUVRES


* Sextuor (1990)

    Ces quatre pièces pour sextuor à cordes (2 violons, 2 altos, 2 violoncelles), n'offrent aucune prise à une quelconque référence programmatique. Le titre volontairement neutre, par-delà la référence qu'il implique à la musique de chambre des XVIIIe et XIXe siècles, se contente d'indiquer la formation instrumentale de la pièce, manifestant ainsi le désir de composer hors de toute référence extra-musicale. La première de ces pièces est la conséquence de l'emprise d'un Deus ex machina : hauteurs, durées, dynamiques, timbres sont entièrement déterminés par des opérations logiques, sortes de codes pré-déterminés qui prennent en charge la totalité de l'écriture. L'idée suivie était celle d'une composition qui résulterait de l'application de formules. les trois pièces suivantes, composées dans le même esprit, l'ont cependant été avec une rigueur moindre.

* Passion Flower (1990)

* Aerea (1991)

* Septuor (1991)

* Le ciel noyé (1992)

* Doubles (1993)

* Sur le sable (1995)

* Terre tendre et austère (1996)

            

* Passion Flower (1990)

   Ecrite pour percussions (un percussionniste) et contrebasse, Passion Flower répond à une préoccupation essentiellement rythmique. Si pour cela les percussions constituent des instruments privilégiés, il en va différemment de la contrebasse. Aussi l'écriture de cet instrument a-t-elle été en quelque sorte dévoyée : de nombreux modes de jeux percussifs sont en effet employés ici (coups sur différentes parties de l'instrument avec l'archet, les mains, les doigts, les ongles) tandis que l'écriture plus conventionnelle repose essentiellement sur des interventions ponctuelles. Cette pièce développe un type de travail rythmique presque entièrement calculé : les figures élémentaires et leurs transformations progressives sont le résultat d'opérations simples, mais poursuivies de façon systématique. A un niveau moins local de la forme, la densité événementielle (silences inclusivement) des différentes sections a fait également l'objet d'un contrôle quantitatif, de même que les grandes articulations formelles de la pièce. Cette écriture calculée répond à une volonté forte d'organisation et de maîtrise du temps musical, saisi selon des critères statistiques et arithmétiques. Passion Flower évoque lointainement le jazz (c'est le titre d'un "standard") par le choix de son instrumentation, mais le travail rythmique se situe ici aux antipodes de l'improvisation.

* Sextuor (1989)

* Aerea (1991)

* Septuor (1991)

* Le ciel noyé (1992)

* Doubles (1993)

* Sur le sable (1995)

* Terre tendre et austère (1996)

            

* Aerea (1991)

    Le titre de cette pièce pour orchestre provient du poème "Aux portes d'Aerea", extrait du recueil Retour amont de René Char. En voici les premières lignes : "L'heureux temps. Chaque cité était une grande famille que la peur unissait ; le chant des mains à l'oeuvre et la vivante nuit du ciel l'illuminaient. Le pollen de l'esprit gardait sa part d'exil." Cette pièce voudrait faire hommage à la grande foule des humains des villes. L'antique vision de la cité, ressuscitée dans la peinture de la Renaissance par les vues de "cités idéales", trouve un prolongement dans l'urbanisme exubérant des grandes villes du XXe siècle, même si aujourd'hui la ville se définit également par sa laideur et son outrance et non plus seulement par son sens raffiné de la mesure architecturale. Le rêve, maintenu pourtant, d'ordre et d'équilibre, s'est augmenté du disparate et du fonctionnalisme issu des nécessités de l'économie industrielle. N'importe. C'est l'assemblée des humains qui est intéressante. Et aussi ce paradoxe : l'homme en foule dans la démesure des villes comme force tellurique, naturelle. Ce n'est qu'après le choix du titre, Aerea, que je m'aperçus que ce mot formait un palindrome, venant ainsi fortuitement faire écho aux techniques post-sérielles que cette pièce utilise dans une large mesure. Ces techniques sont utilisées assez librement dans une écriture qui utilise les quarts de ton de manière structurelle.

* Sextuor (1989)

* Passion Flower (1990)

* Septuor (1991)

* Le ciel noyé (1992)

* Doubles (1993)

* Sur le sable (1995)

* Terre tendre et austère (1996)

            

* Septuor (1991)

   Conçu dans le même esprit de "musique pure" que le sextuor, c'est-à-dire sans inspiration extra-musicale, ce septuor est écrit pour une formation comprenant une flûte, un basson, deux violons, deux altos, un violoncelle. Les instruments à vent apportent ici aux cordes un enrichissement certain de la couleur sonore, mais l'écriture privilégie pourtant l'homogénéité des sonorités, la couleur globale de l'ensemble, au détriment des particularités sonores de chaque instrument. Ce septuor a constitué pour moi une tentative d'écriture complète en "densité 24", c'est-à-dire utilisant à part égale les 12 sons de la gamme chromatique et ses 12 sons "complémentaires" (altérés d'un quart de ton). Il en résulte une certaine profondeur de la couleur harmonico-mélodique, plus dense, plus sombre, moins transparente que l'emploi des seuls 12 demi-tons traditionnels n'aurait pu permettre d'obtenir.

* Sextuor (1989)

* Passion Flower (1990)

* Aerea (1991)

* Le ciel noyé (1992)

* Doubles (1993)

* Sur le sable (1995)

* Terre tendre et austère (1996)

            

* Le ciel noyé (1992)

   Cette pièce est destinée à trois instruments de percussions : piano, vibraphone, marimba. Le choix de cette combinaison instrumentale est au service de la recherche d'une fusion des timbres, qui se réalise à plusieurs reprises au cours du déroulement de la pièce. Cette recherche s'est traduite par une égalité de traitement des instruments : par exemple, la virtuosité du piano n'excède jamais celle, pratiquement moindre, des autres instruments ; le vibraphone utilise largement la pédale, faisant ainsi pendant aux résonances du piano. Le ciel noyé est construit à partir d'un accord unique de 12 sons, dans lequel chaque son ne peut se produire qu'à un registre déterminé ("série-registre"). Cet accord représente un état d'équilibre sonore et fournit le matériau des transformations qui s'opèrent soit par processus continus, soit par ruptures, assez abruptes le plus souvent.

* Sextuor (1989)

* Passion Flower (1990)

* Aerea (1991)

* Septuor (1991)

* Doubles (1993)

* Sur le sable (1995)

* Terre tendre et austère (1996)

            

* Doubles (1993)

   L'écriture de doubles était une tradition de la suite baroque depuis le XVIe siècle. Ce qui attire mon attention dans ce type particulier de variation, c'est le caractère libre qu'il revêt parfois, chez J.S. Bach notamment, lequel ne conserve par exemple de la pièce destinée à être "doublée" que le schéma harmonique et le nombre de mesures. Pour l'écriture de cette pièce je retint ainsi l'idée d'une permanence de structures simples de hauteurs, tandis que l'organisation temporelle obéissait à une répartition calculée des événements. La notion du double s'applique aussi à l'instrumentation de cette pièce, les deux instruments pour lesquels elle est écrite (harpe et marimba) présentant des certaines caractéristiques acoustiques communes. Le double est alors compris comme duplication, écho, miroir...

* Sextuor (1989)

* Passion Flower (1990)

* Aerea (1991)

* Septuor (1991)

* Le ciel noyé (1992)

* Sur le sable (1995)

* Terre tendre et austère (1996)

            

* Sur le sable (1995)

   Cette courte pièce pour clarinette seule emploie un grand nombre d'intervalles de quart de ton. Ayant une formation de clarinettiste, j'ai pu chercher sur l'instrument les doigtés de ces notes inhabituelles, et, parallèlement à la composition de la pièce, j'ai établi la gamme complète des quarts de ton sur toute la tessiture de l'instrument. La pièce prend pour point de départ un geste mélodique détendu et contemplatif. Je pensais ensuite la forme, dessinant vaguement une arche, dont les épisodes intermédiaires se constitueraient par l'ajout, dans chacun d'entre eux, d'un certain nombre d'éléments brefs et de caractère variés. Les nouveaux éléments d'un épisode ne font pas disparaître immédiatement ceux de l'épisode précédent, mais en limitent progressivement le champ d'action. Ce procédé formel permet l'évolution vers un climax, avant que la pièce ne s'achève par une réintégration modifiée des éléments de départ.

* Sextuor (1989)

* Passion Flower (1990)

* Aerea (1991)

* Septuor (1991)

* Le ciel noyé (1992)

* Doubles (1993)

* Terre tendre et austère (1996)

            

* Terre tendre et austère (1996)

   Cette composition est née du désir de composer une musique de scène pour le texte de Charles Lescuyer, Péripéties de la chute, texte pour trois lecteurs destiné à être lu sur scène, mais non joué théâtralement. Cette pièce peut également se jouer seule, sans le texte, dans une version écourtée. L'écriture d'une musique d'après un texte fut pour moi l'occasion de la confrontation de deux domaines artistiques dont les rapports, souvent envisagés comme complémentaires, reposent cependant sur l'assujettissement du musicien par rapport à un écrivain. La règle veut en effet que ce soit le musicien qui s'inspire d'un texte, et non l'inverse. (De fait on trouverait peu d'exemples où un texte est écrit pour une musique). Ce statut particulier de la musique dans le rapport musique / texte détermine le musicien à opérer des choix dans la manière dont il prétend rendre compte musicalement du texte. J'ai tenté ici de traduire certains aspects de la psychologie des personnages. Des deux personnages féminins je retins leur caractère hystérique et leur gémellité (amies proches, elles parlent souvent "d'une seule voix"), tandis que du personnage masculin je conservai surtout la composante neurasthénique de son tempérament. Enfin, je fus également sensible, dans ce texte, à l'évocation des éléments naturels tels que le vent ou l'eau.

* Sextuor (1989)

* Passion Flower (1990)

* Aerea (1991)

* Septuor (1991)

* Le ciel noyé (1992)

* Doubles (1993)

* Sur le sable (1995)