I. La couverture |
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Réalisée dans un calque
bleu nuit très profond de 300gr/m² qui révèle
à peine ce qu'il couvre, la couverture est titrée
au crayon à retouche photographique azur (ce qui évite
d'avoir à le fixer et assure la pérénité
de sa couleur), frotté sur un pochoir typographico géométrique. |
II. Temple - Pochoir & acrylique |
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La première page présente,
sur un fond de chimie cyanotype diluée et faiblement insolée,
un pochoir à l'éponge, découpé dans
une radiographie ; même si la découpe est un peu plus
hasardeuse (le scalpel dérape facilement sur le plastique
des radios), nous avons fini par choisir ce matériau qui
peut supporter une grande humidité des pigments et de très
nombreux tirages, sans jamais se déformer. Il peut même
être facilement réparé au scotch en cas de coupure
accidentelle de ponts trop fins. La page a été réhaussée
à la peinture acrylique, par légers coups de brosses
d'un jaune primaire. |
III. Christ-monde
- Cyanotype et bois gravé |
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Le cyanotype est un procédé
photographique assez simple à mettre en oeuvre, qui suppose
la préparation d'un support de papier, de bois ou de tissu,
avec une émulsion sensible aux ultraviolets. Nous avons utilisé
la table artisanale qui nous sert à insoler alugraphies ou
sérigraphies plutôt que de soumettre nos feuilles aux
caprices du soleil. Si la réponse du cyanotype au contact
de toutes sortes de machins faisant négatifs (films, petits
objets, bidulons découpés) est plutot précise,
la chimie semble tout de même un peu hasardeuse. Un mauvais
choix de papier et tout est foutu, un bain trop court (le cyano
se révèle à l'eau), une mauvaise répartition
de la couche sensible, un temps trop court de séchage de
l'émulsion ou une exposition insuffisante et le résultat
peut virer dans des couleurs abominables de vieille pisse, disparaitre
ou simplement s'estomper par plaques malades.
Ici, le négatif est un montage électronique de L.L.
de Mars fait à partir de dessins de planètes en fusion
de C. de Trogoff, tiré sur un film.
Une deuxième couche, sur le modèle des Christ-monde
(comme celui du Campo Santo de Pisa) est réalisée
en bois gravé. |
IV. Destruction
graduelle des fillettes, phase I |
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Il s'agit probablement de la partie à
la fois la plus laborieuse dans sa réalisation et la plus
fascinante dans son résultat plastique : une vignette (image
préparée pour l'impression industrielle, tramée,
moulée, destinée à être calée
dans les blocs de texte en plomb) figurant une fillette et son chat,
sera graduellement détruite sur deux pages, à raison
de quatre passages par page. Comme une telle finesse de trame ne
peut pas être tirée sans bouchage avec des encres à
l'eau et qu'un bon séchage des encres typos nécessite
au minimum deux jours, cette seule page nécessite donc au
minimum huit jours de tirage.
Nous avons donc commencé la réalisation du livre par
ces pages-là, dont la réalisation accompagnera un
bon moment celle des autres. À la fin du tirage, les
pages seront trempées dans des bains teintés d'encre
bleue pour souiller aléatoirement le papier. |
V. Les collections
de gribouillis - Cyanotype II |
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Les nombreuses expérimentations
de papiers pour le cyanotype nous ont conduit à ce choix
de Kraft fort qui supporte très bien la préparation
malgré sa grande finesse, sans se déchirer dans les
bains de révélation et de rinçage. Le motif
est ici une série de gribouillages nerveux qui draguent lointainement
la collection d'insectes.
La profondeur des cynaotypes sur un fond sombre rend encore plus
ambiguë la lecture de cette page. Une exposition dure entre
20 et trente minutes pour obtenir un bon tirage. On en rate souvent.
C'est donc un procédé bien trop long pour le processus
éditorial (ce qui nous encourage à lancer bientôt
une collection).
Contrecollées aux pages de fillettes (I), ces cyanotypes
et leur revers seront cousus avec un feuillet libre de calque qui
met à l'épreuve différents régimes de
lisibilité. |
VI. Forme d'île - Patamogravure |
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Deux modes de la gravure possibles avec
de la simple pâte à modeler d'écolier sont mis
en branle ici. La réhabilitation des pratiques les plus enfantines,
délaissées à l'âge adulte, fait partie
intégrante du travail de bande dessinée de L. La patatogravure,
le dessin au doigts, ont fait déjà de nombreuses apparitions
dans ses albums ou dans nos livres, mais la pâte à
modeler avait jusqu'ici été réservée
à nos travaux d'animation.
La pâte à modeler est étalée au rouleau
à pâtisserie et doit reposer un moment pour être
froide avant la taille. On fabrique un instrument composé
d'une boucle de fil métallique montée sur un bâtonnet
(nous avons utilisé ici un bout de corde de guitare), avec
lequel on pourra creuser la pâte sans engorger les sillons
(ce que ferait une pointe simple). Le deuxième mode de gravures,
en saillie celui-là, consiste à rouler de petits tortillons
de pâte et à les disposer sur une plaque avant de les
enduire. Dans les deux cas, un papier un peu souple est posé
sur les imprimants et frotté doucement avec un mouchoir au
revers. |
VII. Mine flottante
- Bombe et patatogravure |
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Le motif de ce pochoir n'étant
pas fragilisé par de longs ponts fins, il peut être
taillé dans un carton (ce qui nous condamne toutefois à
un petit tirage), ce qui permet de multiplier les détails.
Il est tiré ici sur un papier fin, doublé pour être
solidifié et pour ne pas risquer de voir transparaître
un recto sur un verso au cours des différentes manipulations.
La ligne d'horizon est simulée par un simple coup de bombe
sur une planchette de bois, et les réhauts de nuages et irisations
sont produits par la même pomme de terre, tantôt pleine,
tantôt évidée. |
VIII. La nuque ouverte
- Taille-douce et bombe |
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Cette taille-douce est réalisée
sur rhénalon, un matériau plastique transparent bon
marché, taillé ici par L. avec un simple clou fixé
au scotch sur un crayon. L'avantage du rhénalon, outre son
faible coût et la tendresse du matériau, est sa transparence,
qui permet de tailler directement au-dessus de son croquis. L'encre,
comme pour une gravure sur métal, est poussée dans
les sillons et la plaque doit être essuyée avec une
petite boule de tissu (de la tarlatane, mais on peut faire ça
avec pas mal d'autres trucs) pour enlever tout le paquet de cochonnerie
en trop qui la macule. Le tirage d'une taille-douce est long, régulièrement
foiré, salissant, mais le résultat est toujours une
source d'émerveillement. Ce fut également l'occasion
de vérifier qu'en utilisant les petites meules de notre perceuse,
suivant une intuition de C., on pouvait obtenir de jolis veloutés
granuleux sur le plastique. En y allant mollo mollo, évidemment.
Pour réhausser la gravure, C. a créé un pochoir
utilisé à la bombe, à un centimètre
de la feuille pour obtenir un floutage des contours, comme un jeu
de tubes aux néons. Un magnifique papier chiffon bleu vert
de 300 gr/m² a servi pour cette page ; nous suivons par là
notre habitude de mêler les matériaux et les pratiques
les plus nobles aux plus vulgaires. |
IX. Le cadre des
nuées - Crayons de couleurs et bombe |
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Une première série de nuages
de cartoon est découpée pour servir de pochoir à
des frottages de deux nuances de crayons de couleurs.
Une deuxième couche, dessinée par C. dans une interprétation
très libre des nuées de Dürer dans ses bois gravés,
est également réinterprétée librement
par L., au scalpel, pour produire un pochoir à la bombe blanche.
Le gaufrage produit par la taille-douce du recto construit la page. |
X. Montages littoraux
- Timbres de caoutchouc, gommettes |
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Depuis une trentaine d'année, l'accumulation
de timbres de caoutchoucs pédagogiques, et notamment géographique,
a conduit L. à toutes sortes de productions plastiques, des
séries de grands timbres d'Eldorado aux bandes estampées
du Dialogue de morts [...] en passant par les couvertures
de Amici. Il fallait au moins ça pour justifier
un tel encombrement de saloperies dans un si petit atelier. Ici,
une série de timbres sont découpés et réassemblés
par C. de Trogoff et réhaussés de gommettes bleues
de deux tons. |
XI. Destruction
graduelle des fillettes, phase II |
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Pour composer soigneusement cette destruction
graduelle de la vignette de fillette, il faut réaliser un
cadre et un support de calage ajustés à la presse.
Précision qui serait inutile si nous n'avions pas commencé
par tailler un magnifique cadre ayant pour support du dispositif
imprimant (cales et vignette sur son support) un aggloméré
bien trop épais que ne passait pas sous la presse. À
peine pas. Mais pas quand même.
La matière caoutchouteuse de la matière, rétive
à la destruction, s'obstine à refermer ses plaies
derrière le cutter, puis la pointe de métal, puis
le gros clou de cent. Il faut passer par la gouge de gravure pour
l'entamer. |
XII. Saint Georges
et le dragon - Pochoirs dedans / dehors et papier carbone |
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La première couche de pochoirs
est composée de découpes de silhouettes de L dans
une radiographie, qui peuvent être disposées librement
derrière un cadre de carton. C'est la bombe bleue qui révèle
les silhouettes en défonce. La seconde place les nuées
à l'avant-plan de St Georges et du dragon, sous l'effet de
grattage de papier carbone aux ongles et à la brosse à
cheveux, à travers un second pochoir de C. |
XIII. Gamme des
mouches - Gabarits à trous et à lignes, tampons |
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La partition des mouches est faite d'une
série de tampons d'insectes (deux mouches et une cigale)
à l'encre typographique sur une grille de crayon de deux
passages de couleurs : le premier est appliqué par
une série de cinq fentes, le second à travers cinq
séries de cinq trous. |
XIV.
La serre - Patatogravures, série I & II |
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La serre est appliquée en deux
temps de patatogravure :
la serre de nuit, faite de découpes pleines (six tampons
en pomme de terre combinés peuvent composer l'intégralité
de la serre), est appliquée sur l'intérieur de la
couverture, en blanc.
La serre de jour est dessinée pas à pas, à
mesure que les tampons pleins ayant servis sont évidés,
en imprimant en noir les volets de la serre sur une page de papier
glacé de magazine industriel des années 60. |
XV. Le gaufrier
aux oiseaux - Alugraphie deux couches |
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Pour cette cage de cases, une première
couche d'alugraphie est posée, en noir, au revers des pages
de magazine. Une seconde, en, bleu.
L'alugraphie — ou offset manuel — est une incroyable
saloperie à peine contrôlable que nous nous étions
bien jurés d'éviter comme la peste après tous
nos précédents déboires.
Et puis, vous savez ce que c'est, on oublie la douleur de la gueule
de bois et on remet ça. Nous avons toutefois décidé
de ne plus lutter contre les accidents et de même en provoquer
l'apparition par l'usage de grands aplats vides n'attendant que
de se saloper naturellement un peu plus à chaque tirage. |
XVI. La serre -
Patatogravures, série I & II |
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XVII. Finitions
- Couture, calque, timbrage, rainurage et reliure japonaise |
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Les calques mobiles — destinés
à faire jouer la lisibilité de la première
planche de fillettes et celle du cyanotype aux gribouillis —
sont cousus sur le bord extérieur des pages contrecollées.
Les exemplaires, après que les feuilles aient été
toutes rainurées, sont reliés avec un fil de raphia
bleu céleste, par une reliure japonaise, procédé
qui permet de multiplier dans un même ouvrage les sortes
de supports sans avoir à composer des cahiers (donc sans
avoir à doubler les pages de chaque couleur, matière).
Et voilà. C'est fait.
Trente exemplaires numérotés de 1 à
28 pour les exemplaires mis en vente, et noté A et B pour
les exemplaires hors commerce. On se promet bien de faire plus
simple la prochaine fois, mais quand même, ça valait
le coup. Ce bouquin nous ressemble. Je laisse à votre appréciation
ce que ça peut bien vouloir dire, mais nous somme foutrement
contents de l'avoir entre les mains.
épuisé |
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