Pape : on manque d'infos
par Dominique Hasselmann
Édito paru dans La Croix.

Emotion universelle

04.04.05 | 15h02 € Mis à jour le 04.04.05 | 17h00

C'est une émotion mondiale qui répond aujourd'hui à la disparition de Jean Paul II. Une émotion empreinte de ferveur, de reconnaissance ou simplement de respect sur tous les continents. Les chroniqueurs retiendront plus tard l'extrême attention portée aux derniers jours du pape, que ce soit dans le monde occidental ou dans le monde asiatique, dans le monde africain ou dans le monde arabe, effaçant provisoirement dans un même recueillement le "choc des civilisations". Bien peu d'observateurs auraient imaginé il y a encore quelques jours que les deux principales chaînes de télévision arabes, Al-Jazira et Al-Arabiya, puissent faire le choix de couvrir l'agonie de Jean Paul II quasiment en continu.

Cet élan converge vers le souvenir de la haute figure d'un pape universel, qui s'est appliqué tout au long de son pontificat à parcourir le monde, mondialisant ainsi sa fonction et son message. "Pourquoi est-ce que tu te promènes tout le temps à travers le monde ?", lui a demandé un jour un enfant. "Parce que le monde n'est pas tout entier ici ! As-tu lu ce qu'a dit Jésus ? Allez et évangélisez le monde entier. Alors, je vais dans le monde entier", a répondu Jean Paul II.

Mais les voyages n'auraient pas suffi à porter sa parole sans la puissance de son verbe, la conviction et la fermeté de son propos. Le "N'ayez pas peur !" a résonné et résonne encore bien au-delà du cercle des fidèles catholiques. Et les médias, fascinés par cette personnalité, ont largement diffusé l'image du souverain pontife devenu très vite icône d'un peuple universel en manque de repères et de Père.

La vague d'émotion que l'on constate aujourd'hui peut surprendre. Mais c'est parce que l'on a oublié que le pape, dès le début de son pontificat, en 1978, a voulu repousser les frontières qui ont séparé les hommes et les peuples tout au long du XXe siècle. Ce Polonais qui aura subi la schlague de l'occupation nazie et le joug du communisme n'a eu de cesse de travailler au respect des droits de l'homme, de miner le terreau des dictatures et d'aider à l'effondrement des murs, à commencer par celui de Berlin, tombé en novembre 1989, prélude à la fin de l'URSS.

On cherchait à le cantonner à la Pologne quand il était essentiellement européen. On le présentait comme un fils de l'Europe, alors qu'il se vivait comme un citoyen du monde, s'appliquant à parler toutes les langues, développant une pédagogie religieuse autant par le discours que par l'image, laissant les caméras le filmer à genoux, en prière, plongé dans un dialogue mystique et singulier avec son Dieu.

Pape éminemment politique, Jean Paul II aura aussi débordé les frontières en cherchant à cultiver un dialogue interreligieux sans précédent. C'est aussi de cela que se souviennent aujourd'hui, dans leurs manifestations de tristesse, les non-catholiques. L'évêque de Rome allait ainsi, tête nue, les mains largement tendues vers les autres. Le monde entier s'en saisit aujourd'hui et lui rend un hommage à sa mesure : universel.

Article paru dans l'édition du 05.04.05

 

 

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