L.L. de
Mars : Bon, ça va peut-être prendre
un tour légèrement scolaire dans ma façon de présenter
les choses, puisque ça va être, enfin, c’est un petit
pavé, mais bon... Ça va être rapide. Alors, en gros
(je regarde mes notes)... Bazooka est assez étroitement
associé au mouvement punk ; moi, ce qui m’intéresse,
c’est pas tant ce qui rapproche la scène punk de Bazooka
que ce qui, à mes yeux, l’en différencie nettement...
C’est l’axe que je me suis donné, qui tournera surtout
autour de la notion... enfin... disons pour faire vite d’art et
de contestation, de cette notion telle qu’elle s’est développée
avec Bazooka... alors voilà, voilà ce que je pourrais
dire en gros, pour le mouvement punk : les cibles de la subversion sont
nettement identifiables et inscrivent le punk dans un espace où celle-ci
trouve sa place toute préparée ; la musique bourgeoise est
effectivement subvertie, mais selon le mode, lui, institué du rock’n’roll
(dont les punks ne semblent pas se soucier du conservatisme, par exemple).
Une logique punk qui serait appliquée à ses productions sonores
aboutirait normalement, me semble-t-il, à de la musique expérimentale,
à de la musique bruitiste et pas... et pas à ça...
Donc, il y a pas une subversion de la pratique elle-même, des modes
opératoires, de la pratique artistique, hein, ce qui me parait très
différent de la méthode Bazooka... Je continue : cette
clarté dans la répartition sociologique des cibles de la subversion
et dans les espaces présupposés de leur cloisonnement artistique
n’existe pas chez Bazooka, dont on ne sait jamais clairement
si leur rage est plus nettement adressée aux médias populaires
- comme la bande dessinée et à son pompiérisme -, au
journalisme ou aux modes de présentation et d’historicisation
de l’art contemporain... contre lequel Bazooka semble aussi
bien se poser que contre les codes en usage de la bande dessinée.
Donc, contrairement aux punks, les Bazooka sont ambigus sur leurs
cibles. [...] |