Louvain, Musée Vander Kelen Mertens - La collection fantôme
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Ayant vaguement établi le projet avec ma compagne, de cartographier, année après année, la plus grande partie possible du patrimoine gothique pictural et sculptural de Belgique (profitant de la faible superficie de ce foyer artistique incroyable et de l’accueil qui nous y est assuré par nos amis belges), c’est à Leuven que nous avons décidé de passer une journée, prévenus de la présence là-bas d’un bâtiment exceptionnel, tant du point de vue de sa statuaire que de l’organisation de sa façade, l’Hôtel de Ville : un réseau d’environ trois-cent niches animant d’une sage déraison un bloc rigoureux et blanc. D’une manière générale, le gothique brabançon trouble l’entendement par la paradoxale superposition d’une foison visuelle à une clarté visible, pour reprendre, en quelque sorte, des catégories établies par Georges Didi-Hubeman pour distinguer ce qui ressortit à la visibilité d’une oeuvre (l’espace lumineux, par exemple, que diaprent et segmentent les vitraux, espace qui inclue vos déplacement et votre propre soumission à la mumière du lieu) de ce qui caractérise sa lisibilité (disons: l’application iconologique, le décompte des signes) ; d’une insolente platitude de contour relativement à l’extrême invention de son chapitrage décoratif, c’est un rectangle sans saillie, sans excroissance, sans accident, qui, au sol, élève l’Hôtel de Ville ; son habillage assume seul la réputation de cet étrange corps architectural qui laisse filer à travers les innombrables cloquages de ses statues, niches, corniches, guirlandes, crochets et chevrons, le dessin reposé d’une orthogonalité générale, résistante, maîtresse. Jaillissent au toit des clochetons turbulents, aux arêtes des tourillons à pinâcles.
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