Moteurs
ou
Les Augures


Stéphane Batsal & L.L. De Mars


VI

 

 

hié mon plan. Avec la volée que m’a fichu l’air, le vol et bang ! Ma lourdeur sur le sol. Chié mon plan sans même du sang pour le guider. Rien. Tout jeter. Encore un fantôme ! Et avant : c’est le bitume qui embrasse ma lourdeur oui ! Quel cinéma ! Redingote, mon cul ! Je n’ose même pas passer ma langue sur les lèvres, pour le sel... Juste une pointe ! Elle, si tentée par des nymphes humides. Lubrifiées connoterait ! Une action s’en dégage clairement. Cinéma oui... Et toutes ces idées... toutes ces pensées compressées... ces inepties fusantes... dans le temps jusqu’à tout à l’heure ma Liseuse ! Le temps dont l’élastique a pété. Chié mon plan ! Le sel, le ticket de bus, plus je vous vois plus je vous... compresse le temps, et que se juxtaposent ses idées, et qu’on voit la lenteur de l’égrenage... Depuis la mèche rebelle ! Il s’en est écoulé du gel ! Et l’accident pour fendre. L’incident peut-être... Dans l’accident il y a du sang ! Et pas de sang ! Ou il est en moi et fuit et s’en mêle. L’histoire de Maxi Steve Austin me rappelle celle des Mini Austin ! D’où sortent des gros balaises. Beaucoup plus prosaïque quand je suis seul... Comedia comedia... Bien fait d’éviter ça à Lawrence ! Pourtant je suis sûr que Steve est sorti d’un véhicule trop petit dans un épisode de L’Homme... Viser une grosse hilarité. Une poutre sur l’épaule et tout balayer innocemment sur 180°... Est-ce que tu aimes les films avec des gladiateurs ? Et le pouvoir que prend ta solitude - enfin ! - quand tu deviens chauffeur ? Conducteur de véhicule privé ! Ta maison à chiens, ton appart à verrous ? Tu baves ta liberté entre des murs aveugles ! Sèche un peu tes mâchoires, le Nasdaq, c’est tellement excitant ! Bave qui pendouille sans même s’écouler... avalée bien froide ! Décidé de libérer le monde de ses otages. À commencer par moi, la Liseuse. Depuis quand je l’ai kidnappée ? Au moins depuis ce matin, toute la journée ! C’est bien un enlèvement ! La rançon, elle la paiera elle-même, quand elle me verra, épuisé, vidé. Accepter le paiement et le verser sur son propre con ! Non. Qu’elle se le garde, son prénom. Actinie durcie, sel en croûtes autour de la bouche ! Herpès et caoutchouc ! Corps de galette sur plage ! Blé noir. Or noir ! Mon amour c’est de l’envie, et ma haine du ressentiment. Autant acheter des verrous, une voiture, et une liberté d’apparat. J’oublie le survet ! avec les couilles moulées dans leurs propres traces pisseuses... James Blondes écrasé par une Austin Mini, la redingote en vrac ! Sauvé, réinséré, " j’ai trois chiens maintenant. Qu’on n’approche pas ! ". Des spit boules oui, arrachent et recrachent ! Il y a un truc, c’est que je ne crains plus de rencontrer Lawrence maintenant. Muet ! Comme une taupe qui reprend ses bonnes vieilles habitudes. Bonnes... Vieilles... Et habitudes ! Comme à chaque fois que je me trouve sans con en but. Pas aujourd’hui que je retrouverai ma voix. Elle aura fait quoi comme bruit, ma bouche, aujourd’hui ? Quelques mots avec Mylène, un " vous permettez ? " à l’encombrée sur la 8. Ah ! " un café s’il vous plaît " ! et l’autre chauffard ! C’est devenu flou, mes paroles. Encore sous le coup de la tôle à ce moment-là... Je ne lui céderai rien d’autre aujourd’hui. Langue, voix, bouche, tout ça dans le noir. C’est le moment d’aller au petit cimetière. Inhumer tout ça, avec la procession de mes fantômes... Présence de la Liseuse, et pas dans le cortège, puisque déjà morte ! Présente avec la bouche, la langue et la voix ! Ouverte à l’ensevelissement. Oui, et dans le cortège : Lawrence, en tête, suivi des types du bus — très excités, des types de chez Franz Kafka, comment c’est..., deux, et voués à l’arpenteur... —, et la bonne femme pleine de sacs et roulant sur ses pieds, et l’autre avec qui s’est fait le ticket de bus, un barman, une meute d’actinies, Hartley, Powell, la Compagnie de Jésus et même le Christ en survêtement noir ! Allez ! J’invite ! Chier mon plan et le recouvrir ! Les pattes arrières doivent bien servir à ça !? Parmi, oui. J’oubliais les vers ! Oui, que j’invite au gazon juste sous mes sphincters ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Putain, j’ai cru que mon imagination avait fui avec le reste ! Un vide, imaginaire probablement... Pas capable de grand’chose, mais si je perds cette faculté... Rien ! J’ai dû chier de l’herbe... Comme tout aujourd’hui. Rien à gratter, et remballer ses pattes arrières ! Chier de l’herbe oui, c’est vraiment ça. Toute cette coulée depuis l’éveil. Le déroulement de la journée se résume à ce doux tapis vert... Déjections de coqs et d’ânes ! Bon, j’ai quoi ? Une heure, oui, une heure avant de déplorer être passer inaperçu... Elle va se dire quoi ? Je suis affreuse, le salaud, je me sens humiliée, ce sont mes fesses, je l’ai toujours su... Mes fesses, cette culotte de cheval ! J’aurais peut-être dû mettre mon petit haut Vichy... Une heure, bon, du rhum ? Une branlette dans mon propre gazon ? La terrasse rue Wattez, Lawrence sera peut-être là-bas. Et puis voir des jambes en mouvements, des pieds, des chaussures ouvertes. Plus tard le visage... Et c’est bientôt l’automne et elles vont toutes les ranger. Jambes, chaussures... Tout ça invisible jusqu’à l’année prochaine. Allez hop ! au placard, avec le soleil ! Quel ennui... Se retrouver sur le front, avec ma mèche, toute une saison. Si elle pouvait tomber avec l’automne ! Que dalle ! Et les miroirs conservent le même éclat... Et si j’allais au rendez-vous peut-être que ça changerait tout et que l’hiver ne viendrait pas faire pousser la mèche rebelle ? Mais non, elle ne tient pas, la Liseuse. La preuve : je n’y vais pas ! Pas de rendez-vous, rien ! Juste un rhum ! La branlette, comme pour les visages : plus tard ! C’est d’un ennui ça aussi... Combien de fois ma queue durcie est devenue molle rien qu’à l’idée de me masturber ? Ou de mettre en branle cette idée ! Debout, assis, une cuisse soulevée, sur un côté, sur l’autre, un peu en arrière, il était une bergèèreu qui allait au marché, elle portait... Rien ! Le mou, et mon souffle las qui le fait frissonner... Toujours délicieux ce rhum arrangé, pourtant les propriétaires du café ont changé... Et il y a cette vision superbe de la gouttière en face. Couverte de vert-de-gris. Ça devient rare. Du putain de plastique ! Partout, affreux à son apparition, affreux à l’usure... Affreux comme ce qui l’a amené là ; prix de revient, consommation etc. Façades d’immeubles pourries, bouffées, en un ou deux ans... Coulures de toutes sortes... Et on vient se plaindre des taggeurs ! On produit des taggeurs comme des façades qui se dégradent rapidement. ET. L’un ne va pas sans l’autre ! Le même processus ! Comment ils sont aveugles pour certaines choses ! Gouttières en plastique, poupées en plastique, pompes en plastique, couilles en plastique, un désastre ! Pas elle en tous cas ! " Je reviens oui ". Tiens ! Je m’entends parler maintenant ! J’espère qu’il a entendu et qu’il ne va pas débarrasser le verre. Où elle est passée ? Ah ! Même bruit de talons que Valérie, ça doit être ça qui m’a attiré... Bien 11 centimètres ! Oui. Pourtant Valérie n’a jamais porté de chaussures aussi hautes. Ça doit tenir à la façon de marcher. Les jambes bouger d’une certaine manière. Fonctionnement des articulations, longueur de jambes, fonctionnement du corps en général, de l’organisme, qui joue un rôle dans la façon de se déplacer forcément. Préoccupé ou détendu, on ne se déplace pas de manière identique. Je deviens sourd... Ou la rue est devenue trop large et les talons, la démarche, ne résonne pas. Elle est là pourtant ! Faire mon petit jeu peut-être... Passer devant elle et la suivre en la laissant derrière... La suivre au bruit produit en marchant... Colorer le vernis, tiens ! Mais oui ! C’est ça ! Avec ces petites barres roses que j’ai achetées en même temps que la paraffine ! Je ne peux pas couvrir ce collage. Ce qui déconne c’est la teinte de la chair passée par le soleil. Enlever ça, ôter ce qui est visiblement disparu, en ajoutant une couche translucide légèrement teintée... Ça ne marchera pas, il me faut du vernis à ongles à diluer avec du White ou un vague solvant. Tiens, je vais aller voir ça ! Ses chaussures sont ouvertes et ça devrait être visible. Elle pourra peut-être me renseigner... Bonjour, j’ai fait un grand collage, pensez-vous que je puisse sur environ deux mètres carrés étaler du vernis à ongles ? En l’ayant détendu d’abord avec un solvant ? Évidemment ! Joli profil les mollets ! Et 9 centimè-tres plutôt ! Ouvertes, parme... Pas de vernis... Shit ! Si vous portiez du vernis à ongles, pensez-vous que je puisse étaler, sur environ deux mètres carrés... Ma Liseuse ! Comment ! je n’y crois pas ! Qu’est-ce qu’elle fiche devant un horodateur ? Qu’est-ce que je fais ? Mylène me dirait que si elle est là c’est comme de passer sous une échelle ! Ou de marcher dedans ! - tiens ! revoilà la pelouse qui s’étend depuis ce matin ! Houla, ça va très vite et il faut que j’aille plus vite encore... De quoi je pourrais bien faire semblant ? De ne pas la voir, de tomber, faire la queue derrière elle pour un ticket ? est-ce qu’elle sait que je ne possède pas de véhicule ? Une chose, c’est que je ne peux pas produire un semblant de surprise de la trouver là, trop tard, et pourtant je la suivais ! Ou est-ce que je lui dis ? Je suivais une inconnue chaussée et suis très surpris de vous rencontrer à sa place ! Redingote ! Ou elle fait le coup de l’horodateur... On se sent suivie et paf on se pose de profil au trottoir pour une vision diagonale derrière soi... L’air de rien, voir venir le danger... Et le coup de refaire son lacet ! Moins bonne vision. Et ses superbes pieds serrés entre deux brides ! Je me demande si... Lui parler ? Mais avec les dernières échauffourées de ma voix avec le chauffard... Soit elle est éraillée soit elle va continuer sur sa lancée agressive... Comment j’ai demandé le rhum tout à l’heure ? Un son a dû sortir, puisqu’un verre est arrivé ! Mais le type me connaît et je suis un peu comme ceux à qui on sert au comptoir un rouge ou un demi, sans rien demander ! L’habitué qui passe devant la vitrine et arrivé au comptoir la mousse commence juste à ne plus monter ! Avec le rhum pas la même image, mais c’est exactement la même chose... Je dois sentir le rhum en plus ! Ô sel regretté par mes lèvres ! Tu sais que tu es allée à la mer avec moi ? Tu sais que tu t’es promenée toute la journée en ville ? On a discuté avec Mylène, rappelle-toi, on a évité Lawrence... Et quoi comme idée de mensonge...? Tu sais que je suis passé sous une échelle, pour t’empêcher de traverser ce monde de dangers ! Et quoi ? Des bouquets de fleurs, des animaux marins, des anglais, des types plein les bus avec des yeux plein la tête, des tickets que j’ai compostés à ta bouche ! Tu as participé à un convoi mortuaire, en tête, avec ma bouche qui faisait le deuil de son sel, ma langue de ses cristaux et ma voix de son onde ! Ha ! Tu ne sais rien de tout ça ! Elle ne saura rien de tout ça, et elle était là pourtant, avec moi ! C’est bien elle qui tenait les rênes, et moi qui les débridais ! Enfin, hors de son comptoir... Enfin son cul et ses jambes, sa tenue debout ! Devant le comptoir même ; un horodateur ce n’est rien d’autre. Rien d’humain, c’est sûr ! Sinon le chewing-gum qu’on enfonce parfois dans la fente de sa bouche, qu’il ne mâche pas ! Métaphore de merde ! Et qui pourtant lui donne de l’aérophagie, au point de ne plus être capable d’absorber, et d’évacuer, quoi que ce soit ! Arrivent de drôles de thérapeutes dans ces cas-là... Avec armes à feu ! Tout de bleu vêtus ! Même pas des flics ! Semblant de quoi ? Avec la manche de ma veste à moitié arrachée dans l’accident, je ne pourrai rien faire d’autre que de sortir des griffes d’un Steve Austin énervé ! Et qui déboule de sa Mini ! Passer chez moi et me changer... J’ai un rendez-vous ce soir, et je vois que vous possédez une automobile, aussi, je me permets de... me couvrir de poussière oui... Je dois en être couvert à traîner comme ça en ville, et par terre... Manche arrachée, à moitié une odeur de rhum, à demi clochard. Probablement la mèche en bataille... En bataille, sur le front... C’est toujours la guerre là-haut ! Neptune qui jaillit d’entre les vagues, échevelé d’écume ! Tiens, et mon libraire préféré ! Un peu coiffé comme Neptune... Ressemble en rien à celle qui est devant moi... D’une autre librairie. Principal souci : savoir dire apostrophe en anglais ! Et Lawrence qui vient si souvent chez lui, et pourquoi il ne lui demande pas ? Pourquoi il ne l’apostrophe pas en anglais justement ! " Hey, ya ! ". Ou il n’a qu’à épeler à ses fournisseurs britanniques le nom sans l’article et l’apostrophe... Rue Échange, ça arrivera ! Ça me donne une idée cette histoire... Encore du vague : ça concerne comment négocier avec la Liseuse... Ex-Ma-Liseuse... Là, elle est là et elle me plaît davantage... Connerie, mais c’est décidé. Donc, comment faire stop, annuler, le rendez-vous et tutti quanti ! En même temps... son allure, son maintien... et le fait de l’avoir suivie sans la reconnaître ! Finalement... Les jambes, putain ! les chaussures, le cul quoi ! Donc c’est quoi cette idée déjà ? Toujours ça file... Ah oui ! Lui refiler son adresse. Lui rendre ! Lui redonner le papier sur lequel elle a été notée. Je l’ai sûrement en poche arrière. Faudrait faire vite, ou ne pas cesser de parler en fouillant. Qu’elle n’ait pas le temps de réagir à mon apparition. Donc agir ! Il faut agir maintenant, mais quoi ? Quoi dire ? Déjà, son adresse... bizarrement négociée, euh... C’était comment...? chié... Je ne me... Sa collègue, voilà, plutôt boudinée oui, voilà ! Faire de la lèche pour prendre l’adresse de la Liseuse, et Lawrence apparaît. Le sauveur ce type ! Un sauveur ! Un signe providentiel ! Shoes italiennes, panama, les S en miroirs de son Tergal, avec mon petit sourire insaisissable, comme si je voulais ajouter à la vénusté de l’anglais... Voilà, c’est de ça dont je lui parle — moins le sourire. Et puis... Comment c’est... Oui, elle craque, voilà ! Sur le type d’accord, mais sur l’apparence ! C’est mon meilleur ami ! Ben, tiens ! Etc, et il fallait que je le fasse venir bien sûr, mais avant, soustraire l’adresse de la Liseuse... Avant que l’Anglais parle, avant qu’il lui parle, qu’il l’ouvre... C’est ce qui se passe, et elle la note elle-même ! Post-it, jaune, probablement, et collé au fond de ma poche. Un vrai Post-it quoi ! Voilà, avec un petit coeur... Un petit coeur, incroyable. Incroyable de le faire, parce que, sinon, il est beau... Incroyable, parce que " ce n’est pas très grave, et c’est même drôle ! ", non ? Oui oui, refiler l’adresse d’une copine sans qu’elle le sache ! Et j’embarque dans ma voiture jaune, autocollante dans la partie supérieure ! Et pour la faire rire dessiner une bite qui traverse le coeur ! Jump around... jump around... jump around... jump up jump up and get down ! Bon, aller voir la Liseuse, et c’est le jour de l’Escalator, et du rendez-vous. Annoncer qu’on sait où la loger. Tic. Les yeux de l’étonnement. Puis un sourire, drôle de sourire fin, et on ne comprend qu’avec ses yeux que c’est un fond de fierté qui passe. Vanité satisfaite... Un lent contentement... Et surtout ne pas trop montrer. Un peu comme ces filles qui prétendent être occupées, déjà prises, lorsqu’on propose un jour de rendez-vous. Non, pas mardi, je suis prise... Jeudi ? Attends je regarde dans mon agenda... Vide ! Il est vide bien entendu cet agenda ! Pas d’agenda du tout ! Juste un court moment de délice, une giclée de délectation ! Plaisir et pouvoir... Au croisement de la rue de la Petite Touche et de la rue Lepoulpe ! Pas très éloignée, d’ailleurs... Bon... t’anéantir tout ça à coup de Post-it ! Tout le paquet de papiers divers à sortir de la poche arrière... En secouant les miettes de papier rongé, les morceaux de numéros de téléphone, des fragments d’adresses... Ça y est ! Putain, ça y est ! Le visage cette fois ! Vraiment elle me plaît ! Qu’est-ce que je suis sur le point de faire, comme connerie ! Merde ! toute ma poche ! Tu le fais ton geste ou quoi ? Ramasse tout ça au lieu de bégayer ! Voilà... de profil en essayant de cacher la déchirure de ta manche... Le Post-it ! L’isoler en ramassant le reste, et invoquer les dieux du vent ! Souffle ! Allez souffle ! La poche par terre, décomposée ! Et mon visage ! Pas mieux j’imagine, pour accompagner cette dislocation ! Hop, disparue l’adresse ! Posted it anywhere ! Le reste vite ramassé, et une sorte d’insistance, un moment d’attardement dans la lecture du Post-it ! Il n’y a que comme ça que la queue qui traverse le coeur, et un mot courant, pour elle, dans l’adresse, peuvent passer inaperçus. Presque lui mettre sous les yeux ! Enfin... Les obsessions sont vite oubliées... Se retrouver à ses pieds et ne les avoir même pas vus ni regardés ! De quoi se fustiger ! et en même temps, constater que les obsessions tiennent de cette fragilité ça fait plaisir... D’accord. Faire des courses pour ce soir, elle attend quelqu’un... Elle est donc motorisée par cette idée ! Et c’est pour ça qu’elle est devant l’horodateur ! Le sourire ! Oubliée ma poche... Quoi ? Du rhum, oui, j’adore le rhum. Tiens ! on ne s’est pas embrassé, et mon ty-punch qui doit traîner sur la terrasse du Wattez ! Une magicienne cette femme, elle transforme mes plus petites idées, et me fait oublier les plus mauvaises ! Et puis... aussi... non ! Je n’y crois pas ! Jambe droite, et l’autre tendue qui repose sur l’arrière du talon ! La cambrure, revoilà la cambrure ! La cheville, et tout le profil du membre inférieur... Je ne vais pas pouvoir non... Pas pouvoir l’accompagner... Putain d’accident encore en train de se faire sur l’épaule ! Le coup de frein du triceps au biceps ! La déchirure... Ou j’y vais comme ça ! Lui parler tout simplement de l’accident. Ça me paraît simple. Un peu trop... Bon, me changer. Les idées, la veste... Une douche, le miroir, fixer la mèche... L’éclat sur la canine... Pourquoi je la vouvoie ? Trop lyrique ! Ça me sort trop de la bouche... Et allez...! Elle a relevé... Elle capte tout ou quoi cette femme ? Juste pour l’accident, le vouvoiement... décrire avec un peu de lyrisme... La faire participer avec un peu de distance... Jamais raconté autant de conneries je crois ! Bon tout ça c’est pour rire, arrête de te chier dessus comme ça ! Et de te consulter surtout... Okay ! Ravie, ça fait plaisir... Quand même récupérer ma carte de crédit. Mais ! C’est qu’elle prend vite des habitudes, et je n’aime pas posséder trop de clés. Qu’elle m’ouvre elle-même ! Les jambes de dos ! Bon, dans quelle poche déjà ? C’est un peu le piège, laisser ma veste dans sa voiture... Arrête de te consulter ! Les clés de chez moi aussi... Hop ! Elle repère encore... Chiée cette femme ! Je me demande... Qu’est-ce que font tous ces tickets de bus dans sa voiture... Que foutent des tonnes de tickets de bus dans une voiture ? Pas de rouge à lèvres à l’extrémité... Ça rassure ! Lui voler ses clés et voir les heures et les lignes de bus empruntées... Pour quoi faire ? Alors là...! À gauche, à gauche, ne pas passer devant le Wattez ! À gauche, oui. C’est plus long, on a le temps non ? Si on se perd tu passes à mon hôtel ! A 20h00 précises. Si je ne suis pas là c’est qu’il y a eu embrouille... N’oublie pas de prendre ton Lüger ! Le message au concierge bien entendu... À quoi je pense à quoi je pense ! Je suis encore bon pour un mensonge ! Et puis non, tiens ! Comment il s’appelle ? Mais qui ça ? " Qui ? ". Le concierge ! Putain, elle est plus rapide que moi ! Elle est plus vite que moi comme dirait Lawrence... Restent des petites bosses dans sa langue, qui viennent de la natale. Et voilà ! Lawrence devient concierge pendant quelques secondes ! Le prévenir, au cas où ! Bon, ça va maintenant ! Le Lüger que j’imaginais n’entre certainement pas dans ce sac à main ! Du genre qui ne s’arrête pas cette femme ! Je pourrais... Le Post-it, lui sortir... Voilà où loger notre ami, notre cible, je t’y retrouve à 20h00 précises... Si je reste invisible, appelle mon hôtel, le concierge ! Une bonne claque à la vue de l’adresse ! Et du coeur traversé de la queue... Et ça l’arrêterait au moins ! Mais non, y’a personne derrière ! Incroyable ! Si je lui dis être allé à la mer, pour changer de sujet, elle va me demander si j’y ai trouvé mon contact ! Si j’ai récupéré la mallette de fric ! La rue à droite, fuir... Ma veste ! j’ai mes clés ! Si je la plaque là, est-ce que... Trop tard ! Pas assez large la rue, trop de temps à te décider... Bon, tu es sûr que ça va bien !? Ne te laisse pas piéger toi aussi... Non ! non ! non ! non les types du cortège qui accompagnaient tout à l’heure tes organes d’expressions orales ne suivent pas ! Ah ça y est ! et c’est pas mieux ! Ce que je fais dans la vie ! Est-ce que je sais ? Quand même pas à moi qu’il faut demander ça. J’aimerais bien devenir écrivain... Comme ça je ferais apparaître Lawrence, maintenant. Le type de personnage... Il ferait le personnage du type qui arrive toujours à point nommé ! Et ce que je fais dans la vie c’est lui qui s’occuperait de ça... Faire passer le message et on ne me ferait plus chier avec cette question ! On me laisserait tranquille. J’aimerais qu’on me laisse tranquille. Qu’on oublie mon existence. Une pipe et des lunettes, le front dégarni ! Des clopes et du whisky, une Underwood ! Le quoi ? Ah ! le rhum ! Faut que je lui parle du citron... Et une table pour tout ça et le cendrier. Peut-être qu’on peut se procurer les nappes de fumée sans besoin de griller trois milles clopes ! Inodores oui ! Il va me sortir un paquet d’encens ou quoi ? Viens un peu par là toi... Par-dessus le comptoir, le revers de la veste... T’as pas compris ce que j’ai dit ! Sans odeurs ! Je crois que je vais rester avec la caissière... Comment c’est ? Nicole ! Ça me dit quelque chose ce prénom... Drôle d’accent pour dire Monsieur... Mon code ? Qu... je parle tout à fait normalement ! Ah oui... De toutes façons je préfère payer l’apéro et le vin... Au cas où... Je pourrais sans scrupules me soûler scrupuleusement ! Sans délicatesse et méthodique ! Comment, c’est vrai...? Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Le code pour pénétrer un peu dans ma vie ! Mais Mademoiselle ! Pas question de ça ! Mon contact ne m’avait pas prévenu ! Un purificateur d’air, pour les nappes de fumée ! Oh oui, à pieds ! Surtout ne devenir complice d’aucun conducteur ! Et la possibilité de fuir... Répète pour voir ! Allez ! Préfère arriver à pieds, trouver votre maison, et sonner surtout. Sonner et qu’elle m’ouvre sa porte. Et tout découvrir d’un coup. Oublier les courses qu’on vient de faire ensemble... La complicité du passager, la fuite, oublié aussi ! Miroir ô miroir ! Quelle simplicité ! Oui, à tout de suite... Oublié ma veste dans la voiture de toutes façons ! C’est comme les trucs qui sortent de la bouche... Les milles chemins qui explosent, les milles pensées qui connectent... Et la bouche qui sort l’impensé, incontrôlable... Même pour Ma Liseuse je ne laisserais pas ma veste ! À tout de suite... Le temps de faire un peu de cinéma !


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