SUJET : DEUIL NATIONAL (ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES 2002)
----- Original Message -----
From: "Thierry Bouche"
Sent: Thursday, May 16, 2002 3:06 PM
Subject: Re: [terrier] L'être sans sujet
Avec quelque retard, je lis cette discussion.
Le vendredi 3 mai 2002 à 01:23:38, lldemars lldemars écrivit :
l> On tient le raciste, à juste titre, pour un haineux ; mais on se
trompe d'objet pour sa haine si on la croit loin de lui, comme il le dit lui-même,
si on pense avoir tout saisi de cette haine lorsqu'on découvre la catégorie
qu'il dit haïr, si l'on regarde dans la même direction que lui, celle
que pointe si visiblement sa haine; car son objet est étrangement interchangeable
quand sa haine se manifeste toujours sous la même espèce; sa haine
désigne en creux ce sur quoi le raciste fait toujours silence: lui-même.
Voilà le véritable objet, la lettre volée.
Bon, c'est très vulgate psychanalytique, ça. Si tu n'aimes pas
les autres, c'est que tu ne t'aimes pas toi-même, parano = schizo, etc.
C'est une façon confortable d'« expliquer », mais à
quoi bon expliquer ? Apprendre à ces gens à s'aimer, s'aimant
à découvrir en eux des niches d'altérité, reconnaître
cela chez l'Autre et s'en découvrir le semblable ? Aimer pour finir son
prochain comme soi-même ?
Tu finis sur un couplet philosophique qui n'a rien de philosophique. Ce que
tu appelles de tes voeux, c'est un état religieux, avec culte de l'être
(suprême ?) pour fonder la communauté. Je n'ai jamais observé
que ce type d'état soit un exemple en matière d'ouverture d'esprit
ou de prise en compte de l'autre...
l> Un raciste ne parle qu'en généralités
; le groupe, les autres, nous, eux, les gens.
note que là, tu ne parles qu'en généralités...
l> Les premières théories raciales sont
contemporaines de la prolétarisation,
t'es sûr de ça ? N'y avait-il pas des théories raciales
à la découverte de l'Amérique, à l'époque
de l'esclavage, chaque fois que l'on a rencontré un « être
» différent, et qu'on s'est rasséréné en supposant
qu'il était nécessairement inférieur ?
l> Mais qu'arriverait-il, à votre avis, à
un homme politique annonçant clairement ceci: "Il faut que nous batissions
une sixième république campée non pas sur une structure
économique ou politique, mais sur une structure philosophique, dans une
perspective de redéfinition anthropologique radicale qui mette le sujet
au-dessus de toute valeur d'échange, en affirmant que ce que l'humain
produit de plus précieux c'est de l'être", quel sort croyez-vous
qu'on réserve à cette seule parole qui nous arrache à la
chute et à cette auto-exécration entropique?
Pour moi, je serais à peu près autant affolé que par d'autres
discours, plutôt plus, à vrai dire. Pas d'eschatologie, même
s'il s'agit de contrer l'eurologie galopante !
--
Thierry Bouche
----- Original Message -----
From:
Cc:
Sent: Thursday, May 16, 2002 3:26 PM
Subject: Re: [terrier] L'être sans sujet
>> Les premières théories raciales
sont contemporaines de la prolétarisation,
> t'es sûr de ça ? N'y avait-il pas des théories raciales
à la découverte de l'Amérique, à l'époque
de l'esclavage, chaque fois que l'on a rencontré un « être
» différent, et qu'on s'est rasséréné en supposant
qu'il était nécessairement inférieur ?
Voire avant, puisque dans nombre de langages je crois le mot homme ne désigne
que ceux qui font partie du groupe.
Je me pose de grave questions depuis hiers ou j'ai relu ce texte, et ce point
m'a fait également tiqué.
À moins que théorie ne soit entendu ici comme «tentative
de justification scientifique» mais cette scientisation est valable sur
beaucoup de points au 19e.
L'autre qestion corolaire est y a-t-il dans ce cas une version moderne du racisme
qui dépasserait la version bien de base exprimée par la dichotomie
homme/barabare, juif/goy,
rom/gadjo etc...
FILH
----- Original Message -----
From:
Cc:
Sent: Thursday, May 16, 2002 5:41 PM
Subject: Re: [terrier] L'être sans sujet
> LA CONTREVERSE DE VALLADOLID ...
D'après ce que j'en sais et ne sais pas, il s'agissait ici d'un mélange
entre un argument économique et un argument théologique de l'humanité
de sauvages.
Je pense qu'on peut discuter ici de savoir si le raciste (moderne ?) se définit
contre celui qu'il juge inférieur - dans un sens cela colerait encore
mieux à l'anti-sémitisme qui colporte plus de préjugé
de supériorité que les noirs ou les arabes - si le raciste de
l'époque de valladolid (tiens bien infichu de dire quel demi-siècle
- décrérant que les noirs n'ont pas d'âme, ont besoin des
noirs pour affirmer leur propre humanité, ce dont je doute un peu.
(Question corrolaire : contre quoi se construit le catholicisme ? Contre l'ennemi
intérieur, sorciére, hérétique, réformé
? Ou bien est-il uniquement dans une quète de pouvoir interne à
l'occident chrétien ? (Ah ah j'ai fait exprès ici).)
Moui bon ça dérive doucement mais pour résumer :
- le racisme change-t-il avec les siècles. ?
- nier l'humanité d'une groupe humain est il du racisme ?
- le racisme est-il forcément une façon de se définir une
identité ?
- comment l'église catholique vit sont oppositions aux autres ?
- comment les juifs vivent la notion de peuple élu par rapport aux autres
qui
l'ont dans le cul - n'est-ce pas aussi du racisme ? (1).
f.g.
----- Original Message -----
From: "lldemars"
Sent: Thursday, May 16, 2002 8:40 PM
Subject: [terrier] Re: [terrier] L'être sans sujet
>Bon, c'est très vulgate psychanalytique, ça.
je ne crois pas; encore faut-il s'entendre sur ce qui est l'objet de cette haine
quand j'évoque dans ce cas précis la haine de soi; parce que la
haine du sujet, c'est tout de même quelque chose de l'ordre de la superstition
affolée, la haine de l'advention passant par la panique d'être
responsable de soi. En gros, ça cause de la volonté, et pas de
cet animal social qu'est le moi, par exemple, et moins encore de l'inconscient;
et là c'est un matériau philosophique qui est en jeu, pas un matériau
analytique.
>, parano = schizo, etc.
hmm, ça, c'est pas de la vulgate psychanalytique, c'est de la vulgate
bouchienne...
>C'est une façon confortable d'« expliquer
»,
je crois que ça n'est confortable que pour qui balaye son objet pour
l'écarter de soi. Ce qui n'est pas mon cas; c'est ce qui est au travail
en moi, en chacun, qui me pousse à questionner l'origine de ces catégories
superstitieuses; c'est le réflexe que je surprends parfois chez moi en
clôturant subitement l'autre dans son origine qui est la source de ces
questions.
>d'altérité, reconnaître cela chez l'Autre et s'en découvrir
le semblable ? Aimer pour finir son prochain comme soi-même ?
s'aimer soi-même est la seule chose qui mérite qu'on travaille
sur ce genre de questions; aimer son prochain en découle le plus naturellement
du monde
>que tu appelles de tes voeux, c'est un état
religieux, avec culte de l'être (suprême ?) pour fonder la communauté.
pas du tout; ce que je cherche ici (et qui tient plus de la déclaration
désespérée que d'un quelconque projet tendu vers son accomplissement)
est exactement ce que je cherche à travers l'action proposée la
veille des élections (l'appel aux pauvres à brûler un billet
de 10 euros), conduire à écarter le pouvoir de déplacement
financier des constitutifs du sujet.
>> Un raciste ne parle qu'en généralités
; le groupe, les autres, nous,
eux, es gens.
>note que là, tu ne parles qu'en généralités...
"Un raciste", est-ce vraiment une généralité?
>> Les premières théories raciales
sont contemporaines de la prolétarisation,
>N'y avait-il pas des théories raciales à la découverte
de l'Amérique, à l'époque de l'esclavage, chaque fois que
l'on a rencontré un « être » différent, et qu'on
s'est rasséréné en supposant qu'il était nécessairement
inférieur ?
Non. La théorie raciale, c'est ce qui arme le discrédit d'une
catégorie imaginaire humaine d'un semblant de positivité, par
le recours à un usage pervers de la grammaire et des méthodes
scientifiques. L'antijudaïsme, par exemple, est systématiquement
et judicieusement différencié par les historiens du judaïsme
de l'antisémitisme.
>Pour moi, je serais à peu près autant
affolé que par d'autres discours, plutôt plus, à vrai dire.
Pas d'eschatologie, même s'il s'agit de contrer l'eurologie galopante
!
cette crainte n'a aucun sens à partir du moment où la seule valeur
sur laquelle se campe cette proposition est l'être, inaliénable
par essence, non?
L.L.d.M.
----- Original Message -----
From: "lldemars"
Sent: Friday, May 17, 2002 12:10 AM
Subject: Re: [terrier] L'être sans sujet
>- comment les juifs vivent la notion de peuple élu
par rapport aux autres qui l'ont dans le cul - n'est-ce pas aussi du racisme
? (1).
à quoi renvoie le (1)?
Bon; quand bien même on entendrait ton interprétation caricaturale
de la notion d'élection du peuple Juif (image d'un peuple brandissant
orgueilleusement un rapport privilégié avec Dieu), elle serait
tout de même hors-sujet : autant comparer l'orgueil de Nietzche campant
le portrait du Surhomme avec les nationaux socialistes imagineant, eux, une
race de sous-hommes.
Hormis le fait que ce qui fonde dans le Livre l'unité particulière
du peuple Juif est le monothéisme (c'est le Lieu de l'élection)
et non la judéité elle-même, je te cite un petit bout de
truc que ta curiosité t'aura peut-être conduit à déjà
lire sur le Terrier :« Pour la raison même que nul n'a jamais élu
un Roi, on doit considérer que Celui-ci a élu ses sujets; malheur
à eux s'ils sont indignes de son suffrage. De toutes les façons,
malheur à eux. Puisqu'Il est souverain, Il n'aura laissé de leur
côté que le bonheur de lui être risiblement inférieurs.
Tout cela ne serait rien pour eux, puisqu'ils lui sont voués, et qu'ils
l'aiment, s'il n'y avait autour quelques démocrates aigris par la médiocrité
de leurs votes. »
L.L.d.M.
----- Original Message -----
From: "Francois Coquet"
Sent: Thursday, May 16, 2002 4:37 PM
Subject: [terrier] Re: [terrier] L'être sans sujet
>l> Les premières théories raciales
sont contemporaines de la prolétarisation,
>t'es sûr de ça ? N'y avait-il pas des théories raciales
à la découverte de l'Amérique, à l'époque
de l'esclavage, chaque fois que l'on a rencontré un « être
» différent, et qu'on s'est rasséréné en supposant
qu'il était nécessairement inférieur ?
Il me semble qu'une conférence célèbre s'est tenue à
Valladolid pour décider de l'existence ou non d'une âme chez les
Indiens. De mémoire, la réponse, positive, les a "préservés"
de l'esclavage, et est à l'origine de la traite des Noirs, pour lesquels
la question ne se posait évidemment pas (une âme dans un corps
tout noir, et puis quoi encore ?)
J'ai du mal à rendre ça contemporain de la prolétarisation.
François
----- Original Message -----
From: "lldemars"
Sent: Friday, May 17, 2002 12:29 AM
Subject: Re: [terrier] L'être sans sujet
> - le racisme change-t-il avec les siècles.
?
- nier l'humanité d'une groupe humain est il du racisme ?
- le racisme est-il forcément une façon de se définir une
identité ?
- comment l'église catholique vit sont oppositions aux autres ?
pour ces questions (autour desquelles il faudrait peut-être imaginer
une différence plus claire entre le racisme et les théories raciales,
rendue bien compliquée par l'usage), je te renvoie à "Le racisme",
d'Albert Memmi (Idées/Gallimard)
"Le racisme est la valorisation, généralisée et définitive,
de différences réelles ou imaginaires, au profit de l'accusateur
et au détriment de sa victime, afin de légitimer une agression
ou des privilèges". Définition, comme tu le noteras, historico-sociologique
et hélas dépourvue de recherche causale, psychanalytique ou philosophique,
et qui ne tranche pas du tout sur les moyens mis au service du rejet.
Georges Bensoussan, par exemple, note en une phrase les trois phases qui conduisirent
de l'antijudaïsme originel à l'antisémitisme national-socialiste
(ghettoïsation, conversion forcée, extermination) : « Ce fut
au départ "vous ne pouvez pas être Juifs parmi nous". Puis "Vous
ne pouvez pas être Juifs". Et enfin : "Vous ne pouvez pas être".
»
Cette définition d'Albert Memmi suffit en tout cas, pour ce qu'elle n'éclaire
pas du tout les transformation progressives de ces catégories et classifications
du rejet, à rendre nécessaire la différenciation entre
racisme, et théories raciales. Elle est aussi claire qu'insuffisante.
L.L.d.M.
----- Original Message -----
From:
Cc:
Sent: Friday, May 17, 2002 9:07 AM
Subject: Re: [terrier] Re: [terrier] L'être sans sujet
> Cette définition d'Albert Memmi suffit en
tout cas, pour ce qu'elle n'éclaire pas du tout les transformation progressives
de ces catégories et classifications du rejet, à rendre nécessaire
la différenciation entre racisme, et théories raciales. Elle est
aussi claire qu'insuffisante.
Surtout elle ne traite que du cas juif (Juif ou Mosaïque hein ?).
Je dirais même qu'il faudrait dans un premier temps ignorer le cas Juif
car il relève de trop de particularisme.
Par exemple le cas des noirs américains dont la disparition n'était
sûrement pas souhaitée puisque c'était eux qui faisaient
tourner la machine éconnomique.
Elle n'éclaire pas sur les relations que pouvaient entretenir les peuples
dans l'histoire avec leurs voisins : acceptation, rejet, conquète, destruction...
mais il me semble qu'il y avait cependant toujours une notion de nous et «les
autres».
En gros la question que je me pose et qui me semble importante quand tu dis
qu'on ne peut transformer un nazi en démocrate est la suivante : La peur
de l'autre me semble une chose bêtement naturelle et humaine. Est-ce que
la distinction nous/« les autres » est du racisme ? Est-ce qu'on
est d'abord raciste puis on réalise que les hommes sont égaux?
Ou le contraire ?
Bon je suis un peu perdu dans mes questions, leur ordre leur formulation.
f.g.
----- Original Message -----
From:
Cc:
Sent: Friday, May 17, 2002 12:51 PM
Subject: Re: [terrier] Re: [terrier] L'être sans sujet
> à quoi renvoie le (1)?
À rien.
> Bon; quand bien même on entendrait ton interprétation
caricaturale de la notion d'élection du peuple Juif (image d'un peuple
brandissant orgueilleusement un rapport privilégié avec Dieu),
elle serait tout de même hors-sujet : autant comparer l'orgueil de Nietzche
campant le portrait du
Non, elle reste dans une relation nous-les autres. Nous biens, les autres pas
bien. Liée avec une histoire de sang.
Bref des choses que je récuse toujours autant, et que même en m'expliquant
que ce n'est pas une situation si privilégiée que ça, ça
ne changera pas mon avis.
Ce n'est pas parce que c'est au coeur de l'histoire juive que c'est bien. (Ou
de n'importe quoi d'autre).
Que le lien fortement présent entre une religion et une hérédité,
est une chose que je considère comme aussi mauvaise que le droit du sang
par rapport au droit du sol, tellement généreux.
Qu'avec ces histoires d'hérédités on en revient aux notions
de races - c'est quand même amusant de voir qu'une race est une chose
qui n'existe que pour les animaux domestiques (encore que j'aimerais beaucoup
pouvoir avoir une vue historique du mot race) - ou de peuple qui sont au coeur
de ces histoire d'identité de supériorité, d'infériorité,
d'élection, de sang bleu ou de n'importe quelle autre propriété.
Je posais il y peu la qestion qu'est-ce qu'être français est la
réponse ici a bien parlé de choses extérieures à
cette notion de peuple.
Voilà pourquoi je relie le racisme à cette histoire d'élection
: il y a un point commun, (Ce qui j'espère ne sera pas lu comme : «
c'est pareil »), et ce point commun ne me semble pas si innocent que ça,
me trouble et n'en fini pas de me faire poser des questions.
f.g.
----- Original Message -----
From: "lldemars"
Sent: Friday, May 17, 2002 12:58 PM
Subject: [terrier] Re: [terrier] Re: [terrier] L'être sans sujet
>Non, elle reste dans une relation nous-les autres.
Nous biens, les autres pas bien. Liée avec une histoire de sang.
il n'y a aucun lien avec le sang dans l'élection en question; avec cette
Alliance (la troisième), il s'agit de transmission de la connaissance
(celle de la Loi et de son étude)
----- Original Message -----
From: "FiLH"
Sent: Friday, May 17, 2002 8:09 PM
Subject: [terrier] Re: [terrier] Re: [terrier] Re: [terrier] L'être sans
sujet
> il n'y a aucun lien avec le sang dans l'élection
en question; avec cette Alliance (la troisième), il s'agit de transmission
de la connaissance (celle de la Loi et de son étude)
Laurent parfois t'es vraiment chiant. Je pourais même te suspecter de
ne souligner qu'un point litigieux afin d'invalider par induction tout le reste.
Voire que tu étendes parfois ta surdité à des choses qui
t'arrangent bien.
Alors pour bien te mettre les points sur les i.
Je parlais de la notion de peuple, pas de celle d'élection. Le mot «liée»
qualifie la locution «relation nous-les autres»
Autrement dit ce qui nous distingue nous des autres c'est le fait que nos mères
en étaient.
Et c'est bien un lien sanguin.
f.g. agacé.
----- Original Message -----
From: "lldemars"
Sent: Friday, May 17, 2002 9:47 PM
Subject: Re: [terrier] Re: [terrier] Re: [terrier] Re: [terrier] L'être
sans sujet
>Je parlais de la notion de peuple, pas de celle d'élection.
Le mot «liée» qualifie la locution «relation nous-les
autres» Autrement dit ce qui nous distingue nous des autres c'est le fait
que nos mères en étaient. Et c'est bien un lien sanguin.
le lien sanguin dont tu parles est celui de la transmission par la mère
de la judéité, je comprend bien. Et alors? Cette incarnation là
de la métaphore transcendentale qu'est la lignée (transcendance
de la durée et de la mort individuelle) , n'a rien de plus incompréhensible,
choquant, que la transmission du nom du père. Elle ne détermine
rien d'autre que l'appartenance à l'histoire d'un groupe, la reconnaissance
de son origine. C'est toi qui t'acharne à y mêler la notion d'élection.
L.L.d.M.
----- Original Message -----
From: "bonobo"
Sent: Monday, May 20, 2002 12:15 PM
Subject: [terrier] Re:
Bonjour,
Je suis inscrit sur cette liste, mais je ne participe pas. Je lis, comme une
sorte de voyeur Mais j'ai spontanément écrit ces quelques réflexions
en réactions à vos conversations. Comme je me suis fait engueuler
par Laurent pour ma non-participation. Je passe ça sur la liste.
Il n'y a pas un mais des racismes.
Peut-on comparer le réflexe quasi universel de méfiance vis-à-vis
de l'inconnu, de l'étrange, de l'autre, avec, par exemple, le racisme
ordinaire du 19e qui est un racisme de classe,( comme l'est encore le racisme
Anglais qui n'a jamais vraiment glissé dans le fascisme) ou le racisme
idéologique du fasciste qui est un racisme hautement culturel, un racisme
« nostalgique », etc.. ?
Le réflexe :
Le cerveau est fait pour réagir à toute stimulation extérieure
et pour proposer un comportement assurant la survit. Il n'aime pas tout ce qu'il
ne connaît pas et tout ce qu'il ne « reconnaît » pas.
Si nous luttons contre ce réflexe, c'est culturellement.
Ensuite, notre crétin de cerveau a une autre habitude, l'appel systématique
à la mémoire pour juger de ce qui se présente. Il est quasiment
impossible d'appréhender quoi ou qui que ce soit sans qu'instantanément,
notre mémoire ne « classe » le phénomène dans
une catégorie. Tu croises un gars loqueteux, avant même la conscience,
le cerveau a catégorisé le personnage. (Un souvenir, je suis la
route avec un pote, sans argent et à 1000 kilomètre de chez moi.,
Dans les villages, les gens, de loin, changeaient de trottoir. Drôle d'expérience.
L'autre fois ou j'ai été confronté aux racismes, c'est
en Martinique. C'est comme si j'avais été transparent ! Mais les
deux cas ne sont pas similaires justement).
Je n'irais pas jusqu'à considérer qu'il y a un racisme naturel
et un racisme culturel, mais parler de racisme avant, en gros, le 19è,
me semble une immense connerie. Comme de parler de nature avant l'idée
de nature... Le racisme à besoin de la conscience de lui-même.
Il y a eu un racisme « légitime ». j'entends par légitime,
légitimé par le contexte culturel. Il y a des états du
monde équilibré, accepter par dominant et dominé (Il y
en a encore. Le conflit entre le monde musulman et l'occident n'est que la confrontation
de nos valeurs avec celles d'un monde qui se réfère à une
période pré-coloniale, mais aussi du même coup, pré-lumière).
Il a fallu l'humanisme, les lumières, Rousseau, pour que se développent
ces « réactions ».
Le racisme dont il est véritablement question aujourd'hui, l'idéologique,
pas celui de l'électeur crétin « qui n'aime pas les Arabes
» n'est pas tant scientiste que mythologique. L'humanisme pouah ! crient
en chour fachos occidentaux et intégristes musulmans (en passant, les
chefs intégristes de l'internationale musulmane ne cachent pas leur admiration
pour Hitler).
Le racisme pseudo scientifique est celui du 19è. La science devait, pour
les réactionnaires, prouver la légitimité des classes sociales.
Tout part de là. Et même les polémiques sur l'esclavage
ne sont pas entre humaniste et raciste, mais entre humanisme et pragmatisme.
La défense des intérêts. Le « vrai racisme »,
le méchant, est mythologique. Il a utilisé les thèses de
quelques médecins du 19è, mais c'est une instrumentalisation secondaire.
Le raciste du XXe siècle, l'idéologue (les autres sont sans intérêt),
est un « super-réactionnaire ». Il réclame le droit
au racisme comme un état initial de civilisation perdu. Il est le seul
vrai dangereux parce qu'il réclame toute la panoplie, et veut retrouver
le droit à la violence extrême, à l'ostracisme extrême,
à l'exacerbation des passions soi-disant primitive. Il veut se vivre
raciste dans le fantasme d'une structure sociale primitivement pure qui a été
« souillée » jusqu'à la décadence par les idées
humanistes, socialistes, universalistes, cosmopolites, etc... En gros, le racisme
comme symptôme d'une politique totalitaire est une création (exactement
une réaction à) de l'humanisme dans le sens où ses contraintes
morales sont considérées par certain comme une entrave insupportable
à leurs libertés. Il suffit d'écouter les discours de l'extrême
droite. Ils le crient. Ils veulent « effacer la souillure culturelle des
trois derniers siècles. Même rengaine chez le terroriste à
barbe.
Il faut faire attention, je crois, à ne pas confondre un apeuré,
un énervé, et même un gros con avec celui qui réclame
le droit (au sens le plus strict) de tuer son ennemi (son étranger) où
celui qu'il se désigne comme tel et qui, politiquement, veut se donner
les moyens d'obtenir ce droit.
C'est vrai alors que 68 a fait du mal en nous faisant croire qu'un « vieux
réac » était un facho. Je connais des tas de vieux réacs
qui vote bien à droite. Jamais ils ne leur viendraient à l'idée
de faire du mal à qui que se soit. Par contre (et ça m'ennuie
d 'en
parler là parceque je dois l'écrire ailleurs), j'ai rencontré
un socialiste (poste régional important), qui m'a expliqué qu'il
« attendait un régime fort pour faire enfin ce qu'il veut avec
la population ».
La tribu :
La tribu isolée se trouve une définition de groupe : « homme
». Est-ce à dire qu'elle est collectivement, culturellement raciste
? ce n'est pas ce que disent les ethnologues. Oublions l'anthropophage qui n'est
pas raciste puisqu'il te mange et donc te prouve que tu es comme lui puisqu'il
mange son semblable Que sait-on de ce concept qui définit le groupe et
que les ethnologues traduisent par « homme » ? Quel champ sémantique
couvre-t'il ? Est-ce le même « homme » selon les tributs ?
Al
----- Original Message -----
From: "Thierry Bouche"
Sent: Tuesday, May 21, 2002 10:42 AM
Subject: Re: [terrier] Re: [terrier] L'être sans sujet
l> je ne crois pas; encore faut-il s'entendre sur ce
qui est l'objet de cette > haine quand j'évoque dans ce cas précis
la haine de soi; parce que la haine du sujet, c'est tout de même quelque
chose de l'ordre de la superstition > affolée, la haine de l'advention
passant par la panique d'être responsable de soi.
je suis désolé mais je ne vois pas le lien entre superstition
et la panique de la responsabilité. Ce dernier sentiment rentrant de
toute façon assez bien dans des catégories analytiques, non
l> le moi, par exemple, et moins encore de l'inconscient;
et là c'est un matériau philosophique qui est en jeu, pas un matériau
analytique.
ah, j'oublie toujours que pour certains, l'inconscient est un objet en soi,
et pas seulement le complément infernal du conscient, de l'être
et tout ça, le revers, les « coupures », etc.
>>, parano = schizo, etc.
> hmm, ça, c'est pas de la vulgate psychanalytique, c'est de la vulgate
bouchienne...
c'est noté par Freud et repris par Lacan...
l> s'aimer soi-même est la seule chose qui mérite
qu'on travaille sur ce genre de questions; aimer son prochain en découle
le plus naturellement du monde
tu devrais faire curé, Laurent. Non, s'aimer soi-même et aimer
les autres sont deux expressions qui utilisent le même verbe dans deux
sens radicalement différents ; il n'y a pas de « rapport à
soi », puisqu'on est déjà dedans. À part ça,
je suis assez d'accord ;-)
l> "Un raciste", est-ce vraiment une généralité?
ben oui, nous sommes tous des racistes juives noires américaines de Varsovie
!
l> cette crainte n'a aucun sens à partir du
moment où la seule valeur sur laquelle se campe cette proposition est
l'être, inaliénable par essence, non?
j'ai un gros problème avec cet être comme fondement, j'ai à
vrai dire un gros problème avec toutes les notions transcendantes, je
crois que tous les fondements sont nécessairement arbitraires, donc font
le lit de l'intolérance, autorisent celui qui s'en est pourvu (foi, principes,
valeurs) à juger ou décrire les autres à partir d'un perchoir
qu'il
s'est lui-même construit, dont la portée est pourtant limitée
à ceux qui admettent les mêmes fondements.
Bon, j'essaierai de revenir là-dessus plus sérieusement si j'en
trouve le temps...
--
Thierry Bouche
-
----- Original Message -----
From: "rupture"
Sent: Tuesday, May 21, 2002 11:49 AM
Subject: [terrier] Racisme
> Le négationnisme, ce n'est qu'un machine à
faire taire la raison et la contradiction qu'elle apporte au racisme; c'est
en cela que je dis : il SAIT qu'il a choisi le mal. Et veut continuer à
pouvoir le choisir.
Cela correspond tout à fait à ce que je supposais précédemment.
Le collectif raciste se partage entre cynisme et ignorance. Si on ne peut douter
du cynisme des théoriciens, il est impossible de caser la totalité
des électeurs frontistes d'un côté plutôt que de l'autre.
le rapt de la raison peut se faire par volonté ou abandon.
Quant à se focaliser uniquement sur les théoriciens, cela revient
à ne se préoccuper que des risques de haine massive, voire finale.
Les fameuses 10 secondes de haine quotidienne, portées de manière
assassine, font bout à bout des dégats assez conséquents.
Elles méritent également notre vigilence.
Marc
----- Original Message -----
From: "rupture"
Sent: Tuesday, May 21, 2002 3:09 PM
Subject: [terrier] Institutions ? Non
> Une institution n'est pas un individu. J'aurais du
mal à donner une explication claire de la différence - Laurent
s'en chargera avec facilité, - mais la différence existe y compris
quand l'institution se résume à un individu.
J'avance un peu dans le brouillard à ce sujet mais il me semble que sociétalement
parlant, un roi n'est pas un individu mais bien l'organisteur (en partie) de
la dynamique artistique institutionnelle. Le choix des thèmes, bien que
partagé par l'artiste, est égalemnt collectivement toléré,
censuré. La flatterie est reine, la disgrâce en est la punition.
> la suppression des protocoles de la rencontre et
la disparition de la chappe d'a priori qui la précède (allure
de l'interlocuteur, manières de celui-ci etc.).
Une illusion pour une autre. Quand bien même je ne saurais pas que Goudal
porte une casquette, l'écrit (en général, pas celle du
susdit casquetté) porte en lui-même les signes d'une distinction
que tout un chacun pourrait hiérarchiser, même s'il s'y refuse
: orthographe, grammaire, vocabulaire, style, références sont
autant d'éléments qui, faute d'autre chose, me permettent de dresser
une caricature de chacun.
> Cette liste de diffusion, - ou, par exemple, le silence
qui entoure ton intervention et la rend parfaitement "audible" à 80 personnes
Sans doute. Mais de la même façon, la mise à niveau d'une
information pléthorique sur un pied d'égalité et sa transformation
en rumeur, la disparition de l'interlocuteur en tant que responsable de ses
propos, tendent à brouiller en retour ce qui pourrait sembler comme un
lieu riche en ouvertures. Je ne nie pas les avantages mais les désagréments
contrecarrent les vertus d'un tel outil.
> Technologiquement ça change. L'accès
à l'ADSL ou au cable baisse, on peut télécharger de grosses
choses.
Une petite réflexion qui vous semblera bien stupide et qui l'est sans
doute. Je pense à cette phrase mille fois entendue sur le cinéma
: "j'attendrai que ça passe à la télé". De là
à imaginer un vide dans l'agora...
Marc
----- Original Message -----
From: "bonobo"
Sent: Tuesday, May 21, 2002 6:39 PM
Subject: Re: [terrier] Racisme
> Les fameuses 10 secondes de haine quotidienne, portées
de manière assassine, font bout bout des dégats assez conséquents.
Elles méritent également notre vigilence.
on ne peu pas surveiller toute l'humanité ! et j'en rajoute une couche
: Il y a quand même une nuance entre manipuleurs et manipulés ?
Non ? On va mettre en prison les victimes d'escroqueries parceque, peut-être,
ils ont eux des mauvaises pensées ? Si je dois avoir cette vigilance,
je m'interdis de fréquenter mes contemporains, moi-même peut-être
parfois, ma famille, et surtout je raye de mon existence les bistrots que j'aime
tant. Ben merde. Je pense que la loi peut s'occuper des manipulateurs, l'école
doit s'occuper à former des esprits, et moi, à chaque fois qu'un
proche dit une énormité, je continuerais mon inutile travail d'explication.
Pourquoi inutile ? Le gros con, il ne fait que répéter des bribes
de conneries chopé çà et là en les déformants,
en plus. Tu lui paye une bière et il pense comme toi, parcequ'il se range
à l'évidence, tu t'éloignes, il recommence. Merde, son
pote renchéri. Bon, tu t'y recolles. Ils sont d'accord, mais quand même...
et il te ressorte la dernière de Pernaut...
Se tromper d'ennemi est plus dangereux que d'affronter l'ennemi. Ça fait
tentes ans que les
Républicains se trompent d'ennemi.
Jospin il y a peu : « La France n'est pas en situation pré-fascite
».
20 sur 20.
On ne peut pas empécher les gens d'être haineux 10 secondes. On
peut empêchés qu'ils soient manipulés politiquement.
A+
Al
----- Original Message -----
From: "Lldm"
Sent: Tuesday, May 21, 2002 9:43 PM
Subject: [terrier] Re: [terrier] Re: [terrier] L'être sans sujet
>je suis désolé mais je ne vois pas le
lien entre superstition et la panique de la responsabilité.
Ah bon ? La superstition délègue à l'ordre des causalités
extérieures l'organisation d'un monde considéré come nouménal,
dont nous recueillerions les signes. C'est le règne de la mancie (l'interprétatation
de ces signes), du terrassement, du fatalisme, de l'irresponsabilité
(le monde est donné, il n'y a rien à faire).
>Ce dernier sentiment rentrant de toute façon
assez bien dans des catégories analytiques, non
les sentiments ne rentrent pas dans les catégories analytiques...
>ah, j'oublie toujours que pour certains, l'inconscient
est un objet en soi, et pas seulement le complément infernal du conscient,
de l'être et tout ça, le revers, les « coupures »,
etc.
même en temps qu'associé à ce que tu appelles le conscient
dans la constitution du sujet, l'inconscient est, selon l'analyse (et selon
quoi d'autre? Puisque c'est une instance analytique) seul dépositaire
de la structure, et en cela, oui, un objet "en soi".
>>>, parano = schizo, etc.
>> hmm, ça, c'est pas de la vulgate psychanalytique, c'est de la
vulgate bouchienne...
>c'est noté par Freud et repris par Lacan...
l'équation parano=schizo? J'espère que tu te fous du monde!
>tu devrais faire curé, Laurent. Non, s'aimer soi-même et aimer
les autres sont deux expressions qui utilisent le même verbe dans deux
sens radicalement différents ;
absolument pas; un exemple dans la vie courante de l'animal amoureux: s'il n'a
pas d'estime pour lui-même, pas d'amour pour lui-même, il observe
l'amour qu'on lui porte comme une erreur radicale dont il serait l'objet, une
dégoutation devant l'aimant jugé incapabe de se rendre compte
de sa (non) valeur. Ce mouvement (l'amour) n'existe qu'à la seule condition
d'être bilatéral; dans le même ordre de spécularité,
c'est l'amour qu'on vous porte qui vous rend imaginable l'amour pour-vous même,
cet amour pour soi étant inévident (comme tu le soulignes dans
ta phrase suivante) par la consubstantialité du sujet et de l'objet.
> il n'y a pas de « rapport à soi », puisqu'on est déjà
dedans. À part ça, je suis assez d'accord ;-)
t'es un emmerdeur, tu sais, ça?
>j'ai un gros problème avec cet être comme
fondement, j'ai à vrai dire un gros problème avec toutes les notions
transcendantes, je crois que tous les fondements sont nécessairement
arbitraires, donc font le lit de l'intolérance, autorisent celui qui
s'en est pourvu (foi, principes, valeurs) à juger ou décrire les
autres à partir d'un perchoir qu'il s'est lui-même construit, dont
la portée est pourtant limitée à ceux qui admettent les
mêmes fondements.
L'être n'est pas à proprement parler le "fondement" d'une nouvelle
radicalité, il est plutôt l'objet d'une quête essentielle,
le seul truc qui mérite qu'on continue, qu'on tienne. Ce n'est pas ma
foi qui me conduit au sujet, elle colore juste le sujet que je suis d'une donne
particulière qui participe à sa singularité. Je pense que
l'être est une notion indogmatisante, indogmatisable.
L.L.d.M.
----- Original Message -----
From: "rupture"
Sent: Tuesday, May 21, 2002 9:25 PM
Subject: [terrier] Racisme
> Il y a quand même une nuance entre manipuleurs
et manipulés ? Non ? On va mettre en prison les victimes d'escroqueries
parce que, peut-être, ils ont eux des mauvaises pensées ?
Qui parle de jeter qui que ce soit en prison? Si la raison ne peut vaincre la
peur, alors oui, tout est perdu d'avance. Que tu fasses oeuvre d'explication
autour de toi est effectivement la seule réponse que nous puissions tous
apporter dans notre quotidien. Qu'il faille opposer une analyse poussée
à la théorisation négationniste est également nécessaire.
Et non, définitivement, nous ne pouvons atteindre toute l'humanité.
Par contre, je refuserai pour toujours de faire rentrer dans le cercle de mes
intimes tout haineux fièrement revendicateur. Ma famille en regorge et
ça ne me coûte rien de la vouer à l'oubli.
Je ne peux accepter de verser dans l'absolu manipulateur. Crois-tu vraiment
que tous les électeurs frontistes se soient vu révéler
leur haine de l'autre par la seule force du discours Lepeniste? Il me semble
que tu t'illusionnes sur la nature de ton "gros con" (pourrais-tu changer de
terme, ça m'agresse un peu) tout autant qu'on s'illusionne sur les victimes
de sectes.
L'électorat frontiste ne se réduit pas à la bêtise
de comptoir mais ce qui le caractérise pour partie, c'est l'abandon d'une
pensée longue à construire. Cela vaut tout autant pour des médecins,
des ouvriers ou des chefs d'entreprise. Je n'ai jamais entendu l'électeur
frontiste affirmer autre chose que, par exemple, sa haine des arabes. Il ne
connait en général pas deux mots du programme qu'il est sensé
soutenir, comme tout électeur qui se respecte. Que Lepen leur apporte
la notabilité nécessaire à assumer ouvertement leur haine,
c'est une chose. C'en est une autre de les croire manipulés.
Et nous ne sommes pas différents. Notre pensée aussi se construit
doucement, elle peine parfois à détruire nos petites certitudes,
nos peurs et nos
désirs sadiques.
Marc
----- Original Message -----
From:
Cc:
Sent: Wednesday, May 22, 2002 8:58 AM
Subject: Re: [terrier] Racisme
Racisme toujours...en vrac...
Je cherchais voir si il n'existait pas une version pirate de Bagatelle pour
un massacre sur internet et bien évidemment j'en ai trouvé une.
(C'est chiant de juger quelqu'un sur une rumeur et je n'ai pas 120 euros - cours
actuel de bagatelle - de trop ces temps-ci). J'ai été ammené
à parcourir quelques sites plus ou moins reluisants dont je vous passerais
les url, c'est étonnant de voir comment on confond à un momment
donné fiction, auteur, narateur, les livres entre eux.
Le plus "amusant" c'est que donc Bagatelle est publié sur un site antisémite
que Caroline nous avait signalé il y a peu, mais que j'ai trouvé
le lien sur un site anti-antisémite.
Le pb du site anti-antisémite c'est que la page contenant le lien était
une liste d'actions antisémites. Et on se rend compte tout d'un coup
que toute prise de position anti-israelienne devient par miracle une prise de
position antisémite.
Nous nous posons depuis quelques semaine le problème de la lutte contre
le racisme. Et la tâche m'apparait vraiment difficile et délicate,
d'autant que certains comme ici la compliquent singulièrement.
J'ai aussi reçu ce matin un courier issus de proches du FN je pense qui
est signé UMP et qui «détaille» les mesures en faveur
des étrangers.
Sinon je repense au pb de l'évolution du racisme, je me demande si nous
ne prennons pas les choses à l'envers : le racisme n'est-il pas d'autant
insuportable qu'on sait qu'il n'a pas de fondement ?
Autrement dit de quand peut-on dater la certitude biologique que des choses
comme la couleur de la peau, des cheveux ou autres ne sont pas significatives
?
De quand date la définition du mot race qui spécifie qu'elle s'applique
aux animaux et que c'est le fruit d'une opération humaine ? Je suis tombé
l'autre jour sur un livre intitulé _Les races humaines_ daté du
19e. Avec de jolies planches en couleur. Très difficile de savoir si
ce livre était une tentative de description encyclopédique des
différentes ethnies peuplant la terre (sont contempoaines les premières
grandes géographies par exemple), et donc sans connotation «raciste»
ou bien si c'était une sorte d'exposition de l'humanité dégénérée.
Quand est-ce qu'on arrive à cadrer les notions de différences
et à les séparer des notions d'inégalités ? (En
ce sens par exemple que l'homme et la femme sont différents mais égaux
)
Est-ce que ce travail a simplement eu lieu ?
FiLH.
----- Original Message -----
From: "lldemars"
Sent: Wednesday, May 22, 2002 9:05 AM
Subject: Re: [terrier] Racisme
>- Et on se rend compte tout d'un coup que toute prise
de position anti-israelienne devient par miracle une prise de position antisémite.
Tiens c'est marrant, maintenant que tu le dis... "Anti-israélien",
"Anti-israélien"... Qu'est-ce que ça peut bien vouloir
dire? Essayons avec un autre pays... Curieux, ça signifie forcément
que... Non? Si.
Je pense que ça mérite même pas d'être contredit tellement
c'est, hm, antisémite...
L.L.d.M.
----- Original Message -----
From:
Cc:
Sent: Wednesday, May 22, 2002 9:34 AM
Subject: Re: [terrier] Racisme
> Je cherchais voir si il n'existait pas une version
pirate de Bagatelle pour un massacre sur internet et bien évidemment
j'en ai trouvé une. aurais-tu l'adresse ? Je pense que ça peut
en intéresser certains, dont moi.
J'avais quelque projets sur la chose. Quelle police de caractère pour
la chose hein ? (Dit FiLH en louchant dangereusement vers...) J'vais pas encore
la faire en Didot.
Maintenant j'ai un pb : si je diffuse sur cette liste publique un document pirate
qui plus est anti sémite j'vous dit pas !
Si en plus je diffuse une url antisémite...
Donc je ne ferais rien de public sans l'accord de Laurent !!
(Mince j'ai des intérêts dans la chose moi !).
FiLH lâche (mais je l'ai dit dans mon texte sur les institution).
----- Original Message -----
From: "Thierry Bouche"
Sent: Wednesday, May 22, 2002 4:41 PM
Subject: [terrier] Racisme : une inquiétude
Tout à coup je me pose une question.
Aux alentours de la seconde guerre mondiale, quelques uns des plus grands écrivains
ont fait « la mauvais choix ». Céline, Pound, Artaud... À
quoi on pourrait ajouter Bataille ou Breton (je veux bien que le stalinisme
soit moins pire que le nazisme, mais était-ce un bon choix pour d'aussi
brillants esprits ?). Bref, le gratin de la littérature n'était
pas franchement hyper démocrate en ces temps troublés.
Or, sur cette liste, pas une voix discordante, juste un débat sur les
fins ou les moyens, mais pas le moindre nazillon. Serait-ce un signe de médiocrité
?
--
Cordialement,
Thierry
----- Original Message -----
From: "Lldm"
Sent: Thursday, May 23, 2002 3:15 PM
Subject: Re: [terrier] Racisme
>Quelle police de caractère pour la chose hein
?
fraktur, ben tiens ou comic sans serif, ça dépend de la façon
dont tu prends le truc...
> Maintenant j'ai un pb : si je diffuse sur cette liste
publique un document pirate qui plus est anti sémite j'vous dit pas !
j'en vois peu l'intérêt, il est facile à trouver en ligne
sur n'importe quel bon moteur de recherche.
> Si en plus je diffuse une url antisémite...
Donc je ne ferais rien de public sans l'accord de Laurent !!
Je suis plutôt favorable pour ce genre de trucs, de toute façon,
à la publication plutôt que la pénombre. En l'ayant entre
les mains, on ne risque pas dix secondes de croire alors y trouver des révélations
si profondes que tout le monde a intérêt à les cacher :
on trouve juste un bouquin bâclé, haineux, fou à lier, et
qui plus est stylistiquement en deça des autres livres de l'auteur (si
on y trouve autre chose, c'est que la place était déjà
prise dans la boîte cranienne, et aucun livre au monde n'y pourrait rien
changer).
> Par contre, vu les confrères que t'auras d'office en ligne pour
publier ce truc, je te suggère de t'en différencier en le publiant
accompagné d'une préface, il vaut mieux.
L.L.d.M.
----- Original Message -----
From: "Thierry Bouche"
Sent: Wednesday, May 22, 2002 3:23 PM
Subject: Re[2]: [terrier] Racisme
gef> anti-israelienne devient par miracle une prise
de position antisémite.
toujours cette histoire de confusion peuple/terre/religion qui rend la question
juive indémerdable...
gef> J'ai aussi reçu ce matin un courier issus
de proches du FN je pense qui est signé UMP et qui «détaille»
les mesures en faveur des étrangers.
très croustillant. Si ça vient du FN, c'est tout de même
plein d'humour et assez joliment rédigé. D'un autre côté,
on voit mal qui d'autre pourrait s'amuser à ça... l'« union
de la gauche pour la majorité présidentielle » ;-)
gef> Sinon je repense au pb de l'évolution du racisme, je me demande
si nous ne prennons pas les choses à l'envers : le racisme n'est-il pas
d'autant insuportable qu'on sait qu'il n'a pas de fondement ?
mais rien n'a de fondement !
Tu me fais penser au Ferry de l'autre jour : l'art moderne est-il insupportable
du fait qu'il n'est pas fondé sur la beauté ? Qu'est-ce qui fonde
les canons grecs ? Le nombre d'or ? qu'est-ce qui fonde le nombre d'or ? La
géométrie euclidienne ? Qu'est-ce qui donne à la géométrie
euclidienne plus de poids qu'aux deux autres ?
la démocratie n'a pas de fondements, les droits de l'homme sont arbitraires
; il y a dans les dix commandements un truc qui contient une erreur sémantique
sur le verbe aimer (du genre aime ton prochain comme toi-même), etc. En
général, quand on en vient aux fondements, on constate qu'il s'agit
de « mystères », d'énoncés autocontradictoires
que l'on ne peut ni accepter ni réfuter, ce sont des crimes de la pensée.
Il faut être méga béni-oui-oui pour croire qu'on peut démontrer
l'invalidité du racisme. On peut estimer qu'il s'agit d'une maladie qu'il
faut traiter. On peut s'en donner les moyens. Mais ça reste un choix
arbitraire lié à une époque, à une mode de pensée
dominante qui a les moyens de s'imposer à ses minorités et ne
s'en prive pas.
gef> Autrement dit de quand peut-on dater la certitude
biologique que des choses comme la couleur de la peau, des cheveux ou autres
ne sont pas significatives ?
Il y a une étude d'Engels, où il montre en particulier que si
on prend comme critère la forme du crâne on arrive à une
dispersion géographique totalement différente, qui chevauchent
allègrement les couleurs de peau.
gef> Quand est-ce qu'on arrive à cadrer les
notions de différences et à les séparer des notions d'inégalités
? (En ce sens par exemple que l'homme et la femme sont différents mais
égaux )
ça, on n'y est toujours pas parvenu... Il y a une espèce de susceptibilité
naturelle de l'être humain, qui lui fait doubler toute notion de différence
d'un jugement de valeur.
Le féminisme aux dents longues d'aujourd'hui est d'ailleurs très
étrange, puisque son discours est devenu : « il faut des femmes
dans la vie publique parce qu'elles y apporteront leurs valeurs, leur façon
de faire, qui est _différente_. » Donc niant allègrement
des années de
discours égalitariste !
--
Thierry Bouche
----- Original Message -----
From: "Lldm"
Sent: Wednesday, May 22, 2002 11:47 AM
Subject: Re: [terrier] Racisme
>Qui parle de jeter qui que ce soit en prison? Si la
raison ne peut vaincre la peur, alors oui, tout est perdu d'avance.
Je ne sais pas si la raison peut vaincre la peur (par exemple, on sait désormais
que l'apparente "guérison" d'une phobie trouvera un peu plus loin un
autre support phobique, que la phobie se déplace; alors en est-il toujours
de même pour toute peur? Va savoir...) mais gageons que la raison peut
équiper cette peur comme elle équipe l'angoisse, la mélancolie
etc. et évite l'objectivation délirante de cette peur.
>Je ne peux accepter de verser dans l'absolu manipulateur.
Crois-tu vraiment que tous les électeurs frontistes se soient vu révéler
leur haine de l'autre par la seule force du discours Lepeniste?
Comme je le disais dans un autre courriel, en fait, oui. Mais l'expression n'est
pas très ajustée, il faudrait dire ça autrement: ce qui
se révèle à tous est une caution pour l'engagement de cette
haine dans une forme, précise, pour la mise en adéquation de l'amorphisme
haineux (ontologiquement insaisissable, puisque le propre de cette peur-là
est d'être terrifiée par l'incapacité à délimiter
sa source) à la forme raciste du discours collectif.
>L'électorat frontiste ne se réduit pas
à la bêtise de comptoir mais ce qui le caractérise pour
partie, c'est l'abandon d'une pensée longue à construire.
J'abonde à cent pour cent. Un "con" est un décisionnaire; il a
délibérément choisi une économie du discours, une
forme de paresse "topologique" (il s'édifie en kit), c'est un "communiquant"
religieux, fervent, qui campe sa position linguistique sur un modèle
libéral (cf. premier colloque, "l'idiot moderne")
L.L.d.M.