Cette tête décollée
à peine plus grande qu’une tête d’enfant, pousse
à l’ombre surdimensionnée d’une immense tête
de femme : la calotte crânienne en semble démontable, comme
celle de certains reliquaires que nous avons observés à
la pinacoteca de Siena. La partie supérieure est tenue par la
calotte molletonnée d’un tissu crème. La face peinte,
bonhomme, les grands yeux expressifs et les joues rougies, la taille
inhabituelle de cette singulière tête me font songer à
ces visages de papier mâché qui, sur des armatures légères
de grillage, sourient à vous glacer dans le tonitruement des
carnavals de fleurs. Mais ici les traits sont doux et touchés
par une lointaine mais présente gravité, ils évoquent,
délicatement, la sainteté. Je laisse quelques minutes
mon esprit formuler et disposer en des taches colorées confuses
d’hypothétiques processions, mais, alarmé par l’heure,
je n’y cède pas plus longtemps. Des murs de cette salle,
il me reste encore moins de souvenir que des vitrines qu’elle
abritent: le premier en entrant, sur la gauche, est quadrillé
à grands traits des envergures malheureuses de quatre crucifiés
de tailles et de factures très diverses ; l’un n’est
qu’une bûche, terrible et expressive, l’autre une
théorie de muscles polis et de plis savants au périzonium.
Du mur suivant, plus une ombre ne me parvient en mémoire, pas
plus que de celui qui s’étend derrière l’estrade
(d’ailleurs, je jurerais maintenant que ce dernier était
vide).
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