L.L. De MARS
(1967)
Je
suis une taupe.
Mon travail s'est longtemps tenu entre mes activités
de plasticien
et l'écriture d'articles, de nouvelles et parfois
le plus rarement possible de poèmes. Vous pourriez en lire
une grande partie sur ces pages, en trouver d'autres dans les revues Enculer
*, MMI, La
Parole Vaine , Pré
Carré et quelques rares autres. Une bonne partie des premiers
textes me parait aujourd'hui misérable, creuse, voire franchement
repoussante. Autant dire que les suivants ont toutes els chances de me
faire horreur d'ici peu.
J'ai au passage composé
quelques pièces vocales, instrumentales, acousmatiques, lu
quelques livres en public , illustré
quelques autres pour des lardons ou des adultes, dessiné
trop de bandes dessinées, de
dessins de presse, et fait quelques dizaines de videos.
Je l'ai fait en me tenant à une conception autonome des disciplines,
à la singularité des pratiques, au jeu de leurs propriétés
respectives : dubitatif devant les tentatives de compositions à
pratiques mêlées (écriture dans la peinture, partition-graphe,
fourre-tout visant plus ou moins inavouablement l'art total ou le spectacle),
j'ai assez bordéliquement multiplié mes domaines d'activité
au gré des rencontres problématiques, techniques ou charnelles
qui se fécondent plus invisiblement, comme autant d'opérateurs
clandestins embarqués d'une discipline à une autre. Non
que mon champ spéculatif soit si vaste que ça (une vie humaine
roule généralement sur deux ou trois pauvres idées
au mieux, et il reste à espérer qu'elles ne soient pas mauvaises
depuis le début), mais les sillages possibles sont innombrables
et ne peuvent pas se satisfaire d'un seul métier pour les
recomposer inlassablement.
S'il n'y a pas de confusion
à établir entre les organisations qui emportent les
problèmes soulevé dans et par mon travail, il m'est devenu
de plus en plus difficile de séparer mes objectifs plastiques,
sonores, de mon travail littéraire ; ce qui vise à être
épuisé dans l'écriture comme jeu de motifs visuels
— un coeur rouge, par exemple, sert d'articulation continue dans
« la main» et illustre un possible
mode plastique d'organisation romanesque — mes travaux plastiques
sont envahis par la facture-même du livre (le "reste plastique",
la "décharge", fils de reliure, papiers d'imprimerie, encres typo
etc.), mes travaux sonores s'agencent comme archipels de discours et de
figures, etc. Ce sont mes propres sillages d'impureté, de contagion,
de percolation.
Au cours du colloque « de l'humour libéral...»
(décembre 1999), je jetais rapidement les bases d'une hypothèse
de travail superposant l'atelier (corps et pratique de l'art mêlés)
à l'expérience complète de la vie, hypothèse
qui fait de la pratique de l'art le champ de l'advention du sujet à
la fois dans son organicité et dans la fluidité de son invention
théorique. L'apport constant du travail de J.F. Savang sur le poème
et la critique n'a eu de cesse de féconder cette hypothèse
et de conduire ma réflexion sur l'advention du sujet aux multiples
excroissances théoriques que vous retrouverez aussi bien dans le
texte du colloque suivant que dans Politique
de l'art ou dans les quelques entretiens et essais disponibles
dans le site.
J'ai fondé en 1990 les micro-éditions
K' De M pour —je cite ici Borges —"ne pas passer ma vie
à corriger mes brouillons" ; je publiais alors, sous forme
de brochures à faibles tirages, des textes d'Erstenes, de Jean-François
Savang, d'Allin, de Rozenn Eon, et les miens. Cette expérience
de la publication m'a conduit en 1993, avec ces amis ainsi que Laurent
Pinon, Olivia Blondel et Julien Demarc, à créer la revue
La Parole Vaine,
dont un choix de textes publiés peut-être moins consternants
que les autres pendant trois ans est disponible sur ce site. En décembre
2001 naissait la revue MMI,
en janvier 2007, la revue Enculer,
fondée avec Antoine Hummel, Joachim Clemence et Oolong et en mai
2013 la revue Pré Carré,
avec Julien Meunier, Jérôme LeGlatin, Docteur C.. Cet attachement
à suivre le travail jusque dans ses conditions d'apparition est
évidemment la raison qui m'a conduit en 1997 à créer
le Terrier.
Une petite partie de ce que j'aurais pu dire sur mon
travail en 2002, sa genèse, les raisons qui me conduisaient alors
à le poursuivre, fut l'objet d'un entretien
avec Christophe Petchanatz réalisé pour son Rostre.
Aujourd'hui, je reverrais sans aucun doute les trois quarts de tout ce
bavardage, mais j'ai quelque chose sur le feu. Tant pis.
L.L.D.M.
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Les sept numéros de la revue Enculer sont désormais téléchargeables en pdf ; en voici les liens:
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